Lindy Hop


ECHAUFFEMENT

SOMMAIRE


Lindy Hop (un conte)

La disgrâce du prince

Jean-Louis est à la bourre. Sa réunion commence dans cinq minutes. Il n’aime pas faire attendre son équipe. La porte de l’ascenseur est ouverte, il s’engouffre. D’habitude, il prend l’escalier. L’hygiène. Jean-Louis entretient son corps. En vérité il craint d’attraper un virus qu’il refilerait à toute la comptabilité. Jean-Louis a le sens des responsabilités. C’est ce qu’il répond à ceux qui disent qu’il est claustrophobe.

En vérité, Jean-Louis est superstitieux. Il a remarqué que les comportements de certaines personnes peuvent évoluer de façon improbable lorsqu’il les croise dans l’ascenseur. Au début, il croyait que la laideur de son visage était la cause de ces dérèglements. Mais le phénomène se produit même lorsqu’il est emmitouflé dans plusieurs tours d’écharpe. Les vérités de Jean-Louis sont pétries de craintes et de croyances.

Jean-Louis baisse la tête et se tourne vers la paroi. Il se retrouve face au miroir. Comme tous les matins, ça sent le pet et le fond de teint. Il rajuste son cache-nez et observe le reflet des deux personnes qui se trouvent en sa présence. Jocelyne, la HRM1, et Fabien, le nouveau CIO2. Dans cette société, il est d’usage d’utiliser des acronymes anglosaxons. C’est plus chic et ça rassure les investisseurs sur la performance de l’entreprise. C’est la première fois qu’ils sont rassemblés tous les trois dans un ascenseur. Pourtant, ils se connaissent bien. Chaque fin de mois, Fabien aide Jean-Louis à extraire les données dont il a besoin. Ils en profitent pour déjeuner ensemble au restaurant d’entreprise.

Par ailleurs, Jean-Louis déjeune avec Jocelyne environ tous les quinze jours. En B to B3. Un mot d’esprit qu’il garde pour lui. Jocelyne apprécie Jean-Louis qui gère de façon exemplaire les petites souris de la compta dont l’humidité4 polie et laborieuse fait honneur à leurs bac + 3.  Gâteau sous la cerise, pas d’absentéisme, pas de revendication.

Jean-Louis se demande comment Fabien s’y prend pour se retrouver aussi souvent dans l’ascenseur avec Jocelyne. Les conditions d’un harcèlement lui semblent réunies. Cependant, Fabien est un garçon bien élevé. Comme tous les célibataires de l’entreprise, il ferait bien un enfant à cette grande bringue de HRM dont il suppute feinte la froideur un peu rêveuse. Ça fait plusieurs mois qu’il multiplie en vain les signaux faibles. Mais en cet instant précis, il sent que le monde est en train de basculer : Jocelyne a remarqué sa présence. Sa minijupe et ses collants noirs sont de saison mais elle passe une main sous ses cheveux pour les extraire de sa doudoune. Les faisceaux de fibre de verre d’un blond presque blanc se mêlent aux poils synthétiques qui ornent sa capuche. Le bruit de la fermeture éclair qu’elle abaisse avec impatience dissocie les hémisphères cérébelleux de Fabien qui ferait bien de ne pas écarquiller autant les yeux. Il a l’impression que deux pouces s’enfoncent dans sa nuque comme dans une orange pelée.

  • Il fait chaud, hasarde-t-il en retirant ses gants, dévoilant ses belles mains d’informaticien.

Il lui a semblé que, par-delà ses mains, le regard de Jocelyne s’est heurté aux reliefs du jean, au ras de la veste en duvet dont la coupe avantageuse donne au jeune homme une allure de sportif de haut niveau. Le vol 501 ne répond plus. Le cannibalisme permettra-t-il de passer l’hiver ? C’était le vol 5715, non ? Fabien est un beau gosse à l’humour convenu. Au premier abord, on se dit qu’il peut avoir toutes les meufs qu’il veut. Mais la réalité est plus complexe. Comme toujours.

Jocelyne lève les yeux vers son reflet et se concentre sur son mascara. Une motte terreuse s’est formée sur le bord de sa paupière. Elle avance un ongle tuilé en forme de truelle de jardinier. L’ascenseur s’arrête net. Jocelyne pousse un cri bref. Fabien se précipite.

  • Ça va, Joce ?

Seul le top management l’appelle Joce. Jean-Louis sait que pour lui ce sera toujours Jocelyne. Et quand il parle d’elle, c’est de madame Senlis. On prononce le s. Quoi qu’il en soit, il préfère Jocelyne. Joce embaume selon lui la connivence hypocrite des aristocraties laborieuses.

  • Oui, ça va, merci Fabien.

Puis elle sort précipitamment de l’ascenseur. Fabien reste un instant immobile pour profiter du parfum qu’elle a laissé dans l’habitacle. C’est sa journée. Les cinq mots de Jocelyne tournent en boucle dans son aire de Werken. Werken ou Wernicke6 ?

Jean-Louis sort le dernier, comme il sied entre gradés d’échelons différents. Il en est certain, il s’est passé quelque chose. Vous pourriez répondre à Jean-Louis, qu’il se passe toujours quelque chose, il suffit d’ouvrir les yeux. Jean-Louis n’est pas de cet avis. Fabien non plus.

Le souhait de la princesse

L’assistante du RM7, une petite brune qui sent des pieds, est là depuis déjà une heure.

  • Salut Joce, tu as l’air toute chose, ce matin.
  • Non, ça va. Je me suis mis le doigt dans l’œil dans l’ascenseur.
  • Tant que tu ne te mets pas le doigt dans l’ascenseur…

Janine a la plaisanterie un peu leste. On met ça sur le compte de son tempérament méditerranéen. On est toujours prêt à fermer les yeux sur les frasques d’une employée qui abat le travail de trois personnes. Elle est au courant de tout, elle anticipe, elle alerte, elle trouve des solutions, elle organise. Tout le monde se demande comment elle fait pour garder sa bonne humeur avec des jumeaux en bas âge. La vérité est que Janine a besoin qu’on l’aime. Ses parents l’ont trop aimée. Ou pas assez. Alors, elle fait des enfants et de la trottinette, porte des sous-vêtements transparents et prend des cours de Lindy Hop, comme sa patronne. Surtout, elle met un point d’honneur à être plus efficace que ses supérieurs. En plus, elle sait tenir sa langue. L’esclave idéale. Elle a conscience qu’on l’exploite. Ça lui convient.

Jocelyne aime bien son assistante. Elle lui raconte sa misère affective, sa libido fragile, ses dépenses compulsives, ses séries préférées. Une fois par mois, elles se font un resto pour lâcher la meute et parler de Fabien. Un prince charmant bankable selon Janine. Mais Jocelyne sait-elle seulement ce qu’elle attend d’un prince charmant ? Ses connaissances en Resource management ne lui sont d’aucun secours. Jocelyne a-t-elle seulement besoin de quelqu’un dans sa vie ? Qui sera le plus fort, du schéma familial dont elle est issue, ou du schéma économique dans lequel elle s’égare comme tout un chacun ? Sa frénésie consumériste provoque l’étiolement paradoxal de son désir de l’autre. Comme si trop de désir tuait le désir. La disparition des gros consommateurs semble inéluctable. Seul survivront les individus capables d’entrer en thanatose8 en attendant que l’espace se libère. L’espace ou l’espèce ? Ce lapsus explique peut-être cette libido asphyxiée par le sucre et le prêt-à-porter. Mais selon Janine, les hormones ont toujours le dernier mot. Elle pense que Jocelyne devrait accepter la candidature de Fabien, assortie d’une période d’essai de trois mois renouvelable.

Aujourd’hui, Jocelyne vient de comprendre qu’elle a besoin d’un événement déclencheur pour que sa vie prenne sens. Surtout pas d’une décision. Que s’est-il exactement passé dans l’ascenseur ? Pourquoi cet intérêt soudain pour un homme qu’elle juge gâté, suffisant, banal et, tout le monde en convient, d’une beauté formatée ? Tout à l’heure, en allant aux toilettes, elle a découvert une pastille d’humidité au fond de sa culotte. Qu’est-ce que ça veut dire ? Il faut qu’elle en parle à Jean-Louis.

Dans le cerveau de Jean-Louis

Jean-Louis est trop laid pour tomber amoureux. Il a fait une croix sur l’amour. L’éloge de la différence ne fait naître en lui aucune illusion. Il se shoote aux comédies romantiques, sans grand résultat. Il s’est mis aux séries pour éviter les silences disgracieux lorsqu’il déjeune avec Jocelyne. Plus d’une fois, ce sujet de conversation lui a sauvé la mise. Et puis, regarder la même série, c’est partager son canapé à distance.

C’est son équipe qui lui apporte le plus de satisfactions. Il est à l’écoute, il prend le pouls, il rassure, il forme, il encourage, il protège.

Ce midi, il a rendez-vous avec Jocelyne. C’est la deuxième fois cette semaine. Ce n’est pas normal. Jean-Louis sait que l’ascenseur infernal a encore fait des siennes. La dernière fois, il se trouvait en présence du CEO9 et de Madame Deleuze, de chez Perséphone10, leur plus gros client. Il était question de renégocier le contrat. Madame Deleuze s’était approchée du miroir en prétextant un petit problème de lentille. Jean-Louis avait trouvé le petit salé11 car le bras de Madame Deleuze s’était attardé au contact de celui du CEO. Dieu merci, le contrat n’avait pas été revu à la baisse. Au contraire. On avait tout de même frôlé la catastrophe. Selon Jean-Louis, mieux vaut plusieurs clients modestes qu’un seul gros. Cela étant, ce n’est pas lui le boss. Jean-Louis se doute que le réseautage l’emporte sur la planification rationnelle mais il ne comprend rien au capitalisme courtermiste.

Comptabilité et incompatibilités

La petite nouvelle demande à Isabelle si elle peut lui emprunter une serviette hygiénique.

  • Tu as tes règles ?
  • Non, mais la réunion avec Jean-Louis m’a mise dans un état. Ça ne s’arrête plus !
  • Rassure-toi Corine, tu n’es pas la seule. On en est toutes là.
  • C’est incompréhensible, ça doit être le stress.
  • Tu trouves Jean-Louis stressant ?
  • Non, au contraire. C’est ma première réunion d’équipe, c’est tout.
  • En tout cas, moi j’ai ce problème à chaque réunion, comme toutes les filles de la compta. Nous avons constitué une réserve de serviettes et de tampons.
  • C’est Jean-Louis qui vous fait cet effet-là ?
  • Non. Franchement. C’est le chef idéal mais il est trop moche.
  • Tu es méchante.
  • Sans blague ?
  • C’est vrai, il est moche. Mais je parie que c’est un bon coup.
  • Tu sors souvent avec des moches ?
  • Figure-toi que mon dernier petit copain était moche.
  • Et donc ?
  • C’était un bon coup.
  • Non, je veux dire, c’est fini ?
  • J’ai appris qu’il faisait du tourisme sexuel lors de ses déplacements professionnels à l’étranger.
  • Merde. Il ne t’a rien refilé, au moins ?
  • Il met des capotes. Il est pas teubé.
  • En attendant, il est teubé de la teub.
  • Chuis dég. Et toi, ça va de ce côté-là ?
  • Couci-couça, un coup par-ci, un coup par-là. Attention, le voilà.
  • Je ne déjeune pas avec vous, ce midi, les filles. Bon appétit.
  • Bon appétit Jean-Louis, reprennent en chœur les filles de la compta.

Jean-Louis tient à ce que les filles de son équipe l’appellent par son prénom. Sinon, plus personne ne l’appellerait par son prénom depuis que sa mère est morte. En tout cas pas avec ce frémissement d’admiration dans la voix. Ils vivaient ensemble. Ça a fait un vide. Il habite toujours dans le trois pièces où il a grandi, un HLM rue des Quatre-Frères-Peignot. Son père les a quittés à sa naissance. Il pense que c’est à cause de lui qu’il est parti. Son père ne s’est pas reconnu dans l’épouvantable nourrisson et en a conclu que sa mère l’avait trompé. Mais de là à quitter une femme aussi belle à cause d’un mioche… Car sa mère était belle, très belle même, c’est une certitude. La nature, parfois ! Il pense qu’il n’aurait jamais pu être aussi moche si sa mère avait été quelconque. On se console comme on peut. Tant qu’à être moche, autant être très moche !

Les mystères de la vallée enchantée

Jean-Louis est tenté par les moules frites. Il adore les moules. Mais en face de Jocelyne, pas question de manger des moules. On en met partout. Lui, en tout cas. De toutes façons, la file des moules est interminable. Le bivalve ne pèse pas lourd face aux minutes qu’il va passer avec sa collègue. Jean-Louis s’engage dans la file presque vide des carbonara tandis que Jocelyne prend la direction du stand salades. Jean-Louis se méfie aussi des salades. Une feuille de roquette12 a tôt fait de se transformer en mangonneau13 propulseur de gouttes d’huile bouillante. Il connaît ce mot car la dernière maquette qu’il a construite est une maquette de mangonneau. C’était marqué en gros sur la boîte. Il ne raconte à personne qu’il construit des maquettes. N’éveiller aucune pitié. Quand on lui demande ses passetemps, il s’en sort avec une pirouette. Il dit qu’il va à la salle… de sport, de cinéma, de bain. Pour te branler, pense l’interlocuteur en souriant poliment. On ne peut pas tout contrôler, c’est sûr.

Jocelyne fait un petit signe de la main à Jean-Louis. Il la rejoint à la table qu’elle a shootgunée14, près de la paroi vitrée, avec vue sur le parking. Le bâtiment est tout neuf. Lorsque la boîte a été rachetée, il y a trois ans, la direction du groupe a lancé un projet immobilier d’envergure avec des fonds privés. Dès la fin du chantier, les bâtiments et leur promesse d’occupation ont été revendus avec une marge confortable à un promoteur qui loue maintenant au groupe les locaux au prix fort. Un moyen pour les investisseurs d’empocher quelques millions en hypothéquant la notoriété de la boîte, alors même que celle-ci continue de payer l’ancien bail. Il y a des babyfoots que personne n’ose utiliser, des couloirs interminables, des espaces de repos avec des poufs poire géants, des salles de projection 3D inutiles et surtout davantage de choix à la cantine. Sous réserve que les stands cessent de fermer les uns après les autres comme les boutiques d’un centre commercial en perdition.

Jean-Louis contemple le fond de son assiette creuse. Un lit de pâtes souillé par des régurgitations de canidé grêlées de pépites de lard. Son plat n’est pas à la hauteur de celui de Josselyne, une salade avec des gésiers de canard sauvage et des croutons dorés suspendus dans une canopée de feuilles allant du jaune crocodile au vert chlorophylle, dissimulant un royaume marbré de vinaigre balsamique où nichent des tomates orphelines. Il aurait dû opter pour une grillade accompagnée d’une poignée de frites. Un plat consensuel qui, dans l’assiette du cadre au taquet, ne suscite pas de commentaires.

  • Comment vas-tu Jocelyne ? Ça fait du bien cette lumière !

Jean-Louis n’apprécie pas que son visage soit exposé en pleine lumière. Il a une théorie sur le capital soleil. En vérité, l’obscurité est sa seule amie. Heureusement qu’il n’est pas chauve, pense-t-il parfois.

  • Il faut que je te raconte un truc.

Jean-Louis est persuadé que ce n’est pas sans rapport avec ce qui s’est passé dans l’ascenseur.

  • Ça va mieux ton œil ?
  • Mon œil ?
  • Oui, il y a trois jours, dans l’ascenseur.
  • Ah, mon œil ! Oui, ça va. Il faut être bête pour se refaire une beauté dans un ascenseur.
  • Ou distraite.
  • Tu as remarqué que j’étais perturbée, ce jour-là ?
  • Rien de grave ?
  • Non, j’ai ressenti brusquement une sensation étrange. Je pense que la présence de Fabien y était pour quelque chose.
  • Peut-être une allergie. J’ai l’impression qu’il a changé de parfum.
  • Oui, peut-être… Ou peut-être pas.

Jean-Louis s’étrangle avec un lardon. Il tousse. Il est tout rouge. Jocelyne lui tend un peu de mie de pain pour faire passer.

  • Ça va ?
  • Oui, merci.

Jean-Louis attend que Jocelyne ait vidé sa bouche. Il n’a à propos d’Heimlich que des connaissances théoriques. La prévention lui semble le meilleur des remèdes. Peut-il se permettre ? Secrètement15, il se dit que l’occasion d’entrer dans l’intimité de Jocelyne est trop belle. Comme les tomates orphelines, petit à petit, Jean-Louis fait son nid. Tel le coucou gris, il dépose son œuf dans la couvée de la HRM. Il sera toujours temps plus tard d’expulser les commensaux.

  • Tu ne serais pas en train de tomber amoureuse de Fabien, par hasard ?

Jocelyne est soulagée de ne pas avoir à formuler une pareille ineptie. Décidément, Jean-Louis est un gars très fin. Dommage qu’il soit si moche. Jocelyne ne se voit pas imposer ça à un enfant.

  • Je ne vois pas comment ça serait possible avec tout le mal que je pense de lui.
  • Il a tout de même de sérieux atouts. Peut-être qu’en creusant un peu…
  • Janine me conseille de le prendre à l’essai. Tu connais Janine, toujours le mot pour rire.
  • La vie est une succession de périodes d’essai.
  • Faisons l’hypothèse que Fabien m’ait troublée. Pourquoi ce jour-là ?
  • Faisons l’hypothèse ! Tu te mets à parler comme Fabien !
  • Arrête ! Pourquoi ce jour-là, à ton avis ?
  • En supposant que ton trouble ne soit pas dissipé à l’heure où l’on se parle, je vais te répondre comme Fabien pourrait le faire. Soit, tu es devenue soudainement réceptive à ses signaux, soit il t’a envoyé un signal inédit auquel tu es réceptive. Un nouveau parfum, un nouveau look, une nouvelle coupe, un nouveau flou dans le regard, un nouveau récit qui te permet de te projeter.
  • L’innovation et Fabien, ça fait deux. Comment serais-je devenue soudainement réceptive à ses signaux ?

Jean-Louis prend le temps de la réflexion en mâchant avec application une bouchée de Carbonara. La sauce n’a pas traversé le sommier. Au fond de l’assiette, les pâtes al dente sont sèches et coriaces. L’insalivation prend un certain temps.

Jocelyne plie en quatre une feuille de laitue en prenant soin de l’écraser avec sa fourchette avant de la poinçonner. Puis elle harponne un gésier qu’elle cautérise avec du vinaigre avant d’engager la goûteuse théorie16 nutritive dans sa jolie bouche.

  • Peut-être que ton corps est le siège d’une campagne hormonale déclenchée par des gènes dormants que la maturité a soudainement activés. Nous sommes programmés, tu sais.
  • Pourquoi Fabien, dans ce cas ?
  • Peut-être as-tu toujours été sensible à ses signaux que ta raison refusait de prendre en considération. Des enzymes nouvelles sont venues à bout de cette barrière.
  • Tu es trop fort, Jean-Louis.

Jean-Louis sait qu’il se tire une balle dans le pied. Il contemple le dernier ruban de pâte au fond de son assiette. Un crouton explose entre les molaires de Jocelyne. Il faut réagir.

  • À moins que ta fixation n’ait été le fruit du hasard. Fabien se trouvait là, à quelques centimètres de toi, au moment où tes défenses se sont effondrées. Tu as été l’objet d’une forme d’empreinte17 qui t’attache maintenant à lui pour la vie.
  • Arrête tes conneries !
  • Logiquement, les défauts que tu lui prêtes devraient s’estomper et sortir un à un de ton esprit.
  • Quels défauts ?

Jean-Louis est pris de court.

  • Je plaisante ! Tu aurais vu ta tête !

Ça y est, il est grillé. Jean-Louis passe en respiration ventrale. Il ne sait pas si ses joues sont empourprées ou non.

  • Il fait chaud, bat-il en retraite.

Jocelyne se rappelle que Fabien avait prononcé ces mots dans l’ascenseur. Elle se garde bien de torturer davantage le pauvre Jean-Louis. La situation est suffisamment compliquée. Elle sait que tous les hommes ne rêvent que d’une chose. En tout cas la concernant. Putain de nature.

  • De toutes façons, tu vas être rapidement fixée, rebondit Jean-Louis.
  • Certes. En attendant, pas un mot de tout ça à Fabien. Je sais que vous travaillez souvent ensemble.
  • Soit sans crainte. Et pas d’affolement. Dans une semaine ou deux, tu auras trouvé une explication à tes bouleversements.
  • J’en suis sûre. J’ai pensé à lui pendant deux jours et ce matin ce n’était déjà plus aussi intense. Toutefois, j’ai l’impression que notre discussion a réveillé mon obsession.
  • Nous parlerons d’autre chose, la prochaine fois.
  • C’est affreux, en réalité ça fait trois jours que je ne parle que de lui.
  • Courage.

Le défi de la gardienne des rêves

Profitant de la défection de Jean-Louis, Isabelle propose à Corine de déjeuner avec elle. Isabelle est ravie de profiter du sang neuf de la petite nouvelle. Elle n’a pas forcé les choses. Après tout, c’est Corine qui est venue vers elle quand elle a eu besoin d’une serviette hygiénique.

L’effronterie de Corine amuse la très sage Isabelle.

  • Tu as vu, c’est la deuxième fois que Jean-Louis et la HRM déjeunent ensemble depuis que je suis arrivée.
  • C’est vrai. D’habitude c’est tous les quinze jours.
  • Elle est vraiment très belle. Elle a quel âge ?
  • La trentaine.
  • Tu as vu comme il la kiffe !
  • Dans le service on les surnomme la Belle et la Bête.
  • Vous êtes dures. En tout cas, elle a l’air passionnée par ce qu’il lui raconte.
  • Jean-Louis est très intelligent. Si en plus il était beau gosse, il prendrait le melon.
  • Tu savais qu’en québécois, les gosses signifient les testicules ?
  • Oui je savais. Tu as le bas-zaïre qui brûle ma chérie.
  • Je ne la connaissais pas celle-là.
  • C’est ce qu’on dit au pays de mes ancêtres.
  • Tu y retournes souvent ?
  • Jamais.
  • Comment on dit qu’un homme a le paquet, au pays de tes ancêtres ?
  • L’expression n’existe pas. Tous les hommes ont le paquet, au pays de mes ancêtres ! Regarde ailleurs, tu vas nous faire repérer.
  • Je vais m’habiller comme la HRM. Collants noirs, jupe portefeuille, ballerines chics, coupe au carré, doudoune mode.
  • Tu es sérieuse ?
  • Heureusement, je suis blonde. Je pense qu’il aime le style gamine.
  • Tu es folle.
  • S’il a vraiment quelque chose, je suis prête à fermer les yeux.
  • Tu n’as pas peur de perdre ton job si ça se passe mal ?
  • Franchement, les comptables, on leur court après.
  • Ecoute, tu m’épates. Je vais te filer un tuyau. Mais je veux être invitée au mariage.
  • Acceptes-tu d’être ma témoin ?
  • Tope là. Depuis le début de l’année, il prend des cours de Lindy Hop tous les mercredis pour pouvoir inviter la HRM à la fête de fin d’année. Tu as deux mois. Mais ne te fais pas repérer. Il trouverait ça louche. Tu n’as qu’à le suivre mercredi soir pour connaître son école. Ça te permettra de t’inscrire ailleurs.

Les énigmes de la vie

La fin de l’année approche. Il va falloir montrer au monde entier que la société se porte bien. Fabien et Jean-Louis sont sur le coup.

  • Je pensais avoir le ticket avec Jocelyne mais elle ne me calcule plus.
  • Ne compte pas sur moi pour t’apprendre à draguer. C’est hors de mes compétences.
  • Au moins, tu déjeunes avec elle.
  • Friend zone18.

Fabien teste la requête qu’il vient de mettre au point à la demande de Jean-Louis. L’échantillon arraché à l’ordinateur semble prometteur.

  • Ça sent bon, dit Jean-Louis.
  • Je suis au bout de ma vie.
  • Je te dis que ça sent bon. Calcule la moyenne avec un group by19 sur le mois, on va voir si on a les mêmes chameaux20 que l’an passé.
  • Je vais passer le jour de l’an à Marrakech. J’irai faire une virée dans le désert à dos de camélidé. Je vais lui montrer que j’ai une vie de rêve.
  • Ne manque pas la soirée de fin d’année. Jocelyne adore danser le Lindy Hop. Sur un malentendu…
  • Ça se danse comme le rock ?
  • Ça ressemble. Mais c’est plus rond. C’est l’ancêtre du rock à six temps : 1, 2, 3 et 4, 5 et 6. Le Lindy Hop intercale deux temps supplémentaires pour rester sur huit temps, c’est plus musical : 1, 2, 3 et 4, 5, 6, 7 et 8.
  • Tu as pris des cours ?
  • Ma mère m’avait inscrit à des cours de danse de salon quand j’étais en seconde. Elle pensait que ça me permettrait de trouver une copine.
  • Merde ! Il faut que je m’y mette.
  • Tu trouveras un cours sans problème. Le Lindy Hop revient à la mode. On progresse vite. Tu as, par exemple, le Swingy Dibop qui n’est pas loin d’ici.

Jean-Louis est ravi d’entraîner Fabien sur ce terrain où il a plusieurs longueurs d’avance. Un joli coup de pute.

Une rencontre inattendue

  • Je déjeune à l’extérieur, ce midi, les filles. Comme les étoiles de mer. Bon appétit.
  • Bon appétit Jean-Louis, rugit le chœur des filles de la compta.
  • C’est quoi la vanne avec les étoiles de mer, demande Corine à Isabelle ?
  • Il la fait à chaque fois qu’il déjeune « à l’extérieur », répond Isabelle en mimant des guillemets avec ses doigts. Il parait que l’étoile de mer sort son estomac pour le glisser entre les valves de sa proie qu’elle inonde de suc digestif. Alors, toujours plein d’étoiles dans les yeux ?
  • C’est drôle. Mais je trouve la plaisanterie un peu phallique. A propos, ça mange quoi, les étoiles de mer ?
  • Des moules.
  • Si ça se trouve il va à la pêche aux moules. On en profite pour déjeuner ensemble ?
  • Go.

Une fois par mois, Jean-Louis déjeune à l’extérieur pour faire croire qu’il a une vie sociale. En réalité, il prend un sandwich à une terrasse, à quelques stations de métro. Il fait ça pour ne pas passer pour un cassos aux yeux des filles de son équipe.

  • J’ai envie d’une pizza.
  • Allez.

Corine se prend un supplément d’huile d’olive. Isabelle hallucine.

  • Les hommes préfèrent les grosses, assure Corine.
  • Les femmes aussi.
  • Isabelle !
  • C’est une vanne de ma grande sœur. Une sacrée chaudasse.
  • Moi je n’ai que des frères. Je ne te raconte pas les vicieux.

C’est l’heure de pointe. Les deux filles discutent dans la file d’attente.

  • Jean-Louis prend des cours au Shake That Swing. Du coup, je me suis inscrite au Swingy Dibop. C’est pratique, c’est à côté du boulot.
  • Alors ? Sympa ?
  • C’est cool. Ça chaloupe, ça pousse du boule. Y a des gens de tous les horizons et de tous les âges. Tu devrais venir.
  • Je suis plutôt zouc et salsa.
  • Mademoiselle ne chante pas le blues21 ?

Isabelle donne un coup de hanche à Corine. Les deux filles se kiffent. Elles explosent de rire.

  • Mais tu ne connais pas la meilleure.
  • Quoi ?
  • Tu ne devineras pas qui j’ai rencontré au cours de Lindy Hop.
  • Jocelyne ?
  • Non. Fabien !
  • Fabien ?
  • Oui. Il est débutant. Comme moi.
  • Mince, alors. Il t’a reconnu ?
  • Non. Il n’a pas encore repéré la petite nouvelle. Et il n’a pas osé me demander où je bossais.
  • Vous vous êtes parlé ?
  • Mieux que ça, on est partenaire.
  • Incroyable. Il danse bien ?
  • Il n’a pas trop le rythme. J’ai l’impression que je vais me faire chier avec lui. Je vais être obligée de m’inscrire à une deuxième séance si je veux progresser. Mais je ne vais pas le lâcher. C’est une pointure, il a du fric et il est plutôt sympa.
  • Tu n’as pas remarqué qu’il est loin d’être moche ?
  • Oui. Ça me fait tout drôle. Note que ce n’est pas désagréable, en fin de compte.
  • Tu vas t’habituer. Mais ne t’emballe pas. S’il n’a pas le rythme, ça doit être un mauvais coup. En plus il est à fond sur la HRM.
  • Jocelyne ?
  • Oui.
  • Comment tu le sais ?
  • Le matin, il s’arrange pour prendre l’ascenseur en même temps qu’elle et il est toujours fourré à la machine à café du cinquième.
  • Entre lui et Jean-Louis, il y en a forcément un qui va rester sur la touche. Je n’aurai plus qu’à le ramasser.
  • Fabien et Jean-Louis, c’est quand même le jour et la nuit.
  • Je crois au destin.
  • Et Fabien ? Il te kiffe ?
  • Il va bientôt prendre rendez-vous chez l’orthoptiste à force de loucher sur mes gros tétons.
  • Il va avoir la surprise de sa vie à la soirée de fin d’année.
  • D’ici là, je vais devoir la jouer fine pour ne pas me faire repérer à la cantine. Je vais m’habiller avec un sac jusqu’à la fin de l’année. Je me ferai une queue de cheval et me déguiserai en pétasse dans les toilettes publiques, juste avant le cours de Lindy Hop. Ça va me couter deux balles de plus.

Isabelle regarde Corine avec admiration.

  • Ça tient toujours pour ce soir ?
  • Bah, oui. Pourquoi ?
  • Tu es tellement investie dans la recherche d’un géniteur…
  • Il ne faut pas mélanger le plaisir et la reproduction, ma chérie.

Les yeux d’Isabelle sont comme vous les imaginez. Pas d’erreur.

  •  On se fait un petit resto comme prévu et ensuite je t’emmène chez moi pour te faire découvrir ma collection de joysticks extrême 3D.
  • On va jouer toute la nuit ?
  • Si les piles tiennent le coup.

Le bal du diable

La soirée de fin d’année22 a lieu aux Jardins de l’Ile, une barge idéalement amarrée au cœur de Paris23. Entre déco tropicale et vue sur l’épaisse maçonnerie du pont Neuf. Comme chaque année, c’est Janine qui a tout organisé. L’entreprise est rentable et le fait savoir.

Un ciel sans étoiles recouvre la ville. Il fait froid et sec. La Seine couleur métal a des odeurs de canard et de coquille Saint-Jacques. Un vent léger apporte des bouffées de kérosène en provenance d’un groupe électrogène, chassant à l’intérieur les invités qui affluent.

Pas question de manquer le discours du CEO. Le visage masqué par un loup chouette vénitien, Madame Deleuze, de chez Perséphone, est déjà là, vêtue d’une robe du soir à dos nu agrifée à deux énormes seins. Une corne d’abondance en polyuréthane24 est suspendue au-dessus de l’estrade. Jean-Louis discute avec Isabelle et Corine. Moulée dans une combinaison en lycra, Isabelle est déguisée en chatte cambrioleuse. La queue en peluche attestant sa félinité25 sera-t-elle suffisante pour faire taire les commentaires que ses formes féminines outrageusement dévoilées font naître çà et là ? Elle s’amuse à chatouiller Corine avec ses longues moustaches. Corine rigole. On la sent flattée par les attentions d’Isabelle. Corine prétend être déguisée en Amazone. Bras et jambes nues, bracelets de cuir et sandales. Elle est partie pour attraper la crève. Suspendue à son cou, sa robe transparente flotte comme un miracle autour de ses cuisses charnues. Jean-Louis ne peut s’empêcher de laisser traîner une paire d’yeux sur les muscles de la jeune guerrière.

Le discours va commencer. Jean-Louis fait un signe à Jocelyne et Fabien qu’il aperçoit à quelques mètres. Sont-ils arrivés ensemble ? Robe Charleston, gants du soir, chapeau cloche et mollet glabre, Fabien est habillé en garçonne ! Il exhibe une abondante quincaillerie de colliers et de bracelets. Jocelyne est épatée par son audace. Un coup de maître. Jean-Louis ne fait pas le poids avec sa tenue de Mexicain. Il emmerde tout le monde avec son sombrero qu’il va heureusement très vite devoir abandonner pour danser. Quant à son poncho, il en a déjà recouvert les épaules de Corine qui grelotte. Son gilet noir met en valeur sa musculature fonctionnelle et sans grâce. Au moins, il ne prendra pas froid.

Jocelyne sourit à Jean-Louis. Elle entraine Fabien dans sa direction. Elle est déguisée en Mariée26. Eclair jaune strié de lignes noires, la tueuse ondule jusqu’à Jean-Louis dont l’œil frise. Un sabre japonais lui déchire les entrailles. Les papillons sont réduits en bouillie. Corine et Fabien se saluent. Jean-Louis remarque la surprise de la flapper27. La reine des faux culs fait semblant de ne pas avoir reconnu Fabien sous son déguisement inattendu.

  • Nos costumes se ressemblent, dit Jocelyne à Isabelle. Si tu veux conserver ta queue, prend garde à mon sabre, Catwoman !
  • Ma queue est un fouet redoutable. Reste éloignée de moi, Black Mamba28 !

Le petit groupe s’électrise doucement en écoutant avec attention le discours tellurique29 du CEO. Il faut redoubler d’ardeur. Des forces formidables nous portent et les vents sont favorables. Mais les sirènes de la concurrences n’attendent qu’un signe. Consolidons nos positions, hérissons nos bastions de punch lines acérées. Et surtout, sans cesse innovons pour conserver cette longueur d’avance que le monde nous envie. Nos produits, nos process, nos compétences, nos synergies, nos contrats, tout doit procéder d’une lave mouvante portée à l’incandescence30. Corine se presse contre le dos d’Isabelle, serrant sa queue entre ses cuisses. Elle a froid. Vivement qu’on danse. Jocelyne repère leur petit manège.

À la demande de Jocelyne, Josiane a briefé le DJ pour qu’il passe en priorité du Lindy Hop.

Jean-Louis invite Jocelyne sous le regard impuissant de Fabien. Les deux néanmoins collègues se lancent dans une démonstration tout en souplesse et en audace. Isabelle est leur plus grande fan. Elle ondule à leur côté avec une grâce qui n’échappe à personne. Des couples s’enhardissent sur « In the mood » de Glen Miller. Fabien s’approche de Corine. Il exprime son étonnement.

  • En fin de compte, on travaille dans la même boîte !
  • Tu es Fabien. Je n’étais pas certaine de t’avoir reconnu. C’est incroyable.
  • On n’a pas le niveau de Jocelyne et Jean-Louis mais tu n’es pas contre une petite dance ?
  • Allez !

Voilà nos cinq amis réunis sur la piste. Le parquet est bordé de plantes exotiques chargées de perroquets en balsa aux couleurs vives. Tout est possible.

Fabien ne boude pas son succès. Ce n’est pas un danseur exceptionnel mais il est toujours amusant de voir deux femmes danser, surtout quand l’une d’elles est un homme. Corine n’est pas insensible à ce détail. Elle en conçoit une forme d’exaltation. Elle ne saurait dire la cause qui lui tient à cœur. Les figures s’enchaînent et il lui semble que Fabien danse un peu moins mal, que ses yeux sont un peu plus bleus, que la vie est un peu plus rose. C’est excitant un homme sans poils.

La deuxième dance est un Lindy Hop moins rapide. Fabien tente d’accrocher Jocelyne pour lui montrer ce dont il est capable mais elle a déjà proposé une initiation à Isabelle.

Jean-Louis en profite pour récupérer Corine et Fabien se retrouve seul. Il n’imagine pas se trémousser en solitaire comme Isabelle tout à l’heure. Danser en couple apporte une forme de validation à son accoutrement. Danser seul serait perçu comme de l’exhibitionnisme. Il réalise que sa tenue peut prêter à sourire. Il se demande si c’est bon pour son avancement. Il a déjà dû refuser l’invitation à danser d’un collègue taquin. Il a appris que Corine travaille à la comptabilité dans l’équipe de Jean-Louis. Il ne sait pas si un rapprochement avec une fille de la compta peut nuire à l’image d’expert qu’on lui prête dans la société. Fabien est un calculateur écervelé.

En attendant, Corine s’éclate sous la direction de Jean-Louis. Elle réalise à quel point Fabien est dépourvu de rythme. Avec Jean-Louis, tout semble simple et naturel. Ce type dégage quelque chose. Ce n’est pas clair. Son ventre lui fait mal. Pourtant elle vient de terminé ses règles. Ça recommence. Heureusement qu’elle n’est pas en pantalon. Plus question de s’asseoir. Elle va devoir danser jusqu’au bout de la nuit.

La danse suivante est un slow. Surprenant pour un début de soirée. Janine n’en est pas à son premier coup.

Jean-Louis n’envisage pas imposer la proximité de son visage à quiconque. Même affublé d’une moustache mexicaine. Il se range discrètement sur le bord de la piste. Il fait ça machinalement, sans réfléchir. Il n’y pense même pas. Aucune pensée amère ne traverse son esprit. Il vit avec cette souffrance depuis toujours. Il regarde les danseurs.

Corine se déhanche doucement entre les bras du beau Fabien. Isabelle et Jocelyne se sont enlacées tendrement et dansent presque immobiles. Jean-Louis commence à y voir plus clair dans la complexité de sa chère Jocelyne. D’une main, elle joue avec la queue de sa cavalière, de l’autre elle lui caresse la nuque. Isabelle s’abandonne, les deux bras autour du cou de la HRM.

Du point de vue des cinq complices, la soirée est réussie. Celle-ci se poursuit sans accro. En montant sur le pont supérieur pour prendre l’air, Jean-Louis reconnaît les silhouettes d’Isabelle et Jocelyne. Elles se roulent une pelle XXL. L’odeur de kérozène lui rappelle l’Afrique, à l’époque où il était comptable sur une plateforme pétrolière. Jean-Louis se dit que le monde avance sans lui, qu’il est resté amarré à la mâchoire du golfe de Guinée comme une dent gâtée. Il se dit aussi que le pont Neuf est le plus vieux de Paris. Tout n’est pas perdu. Il reste Janine qui attend qu’on fasse tournoyer son gros cul. Il n’y a pas de temps à perdre.

La nuit parisienne

Fabien se demande où est passée Jocelyne.

  • Elle a dû partir avec Isabelle, hasarde Jean-Louis.
  • Je ne vais pas tarder à rentrer, moi aussi. Et toi, Corine ?
  • Pareille.
  • Je peux vous déposer, je suis venu en voiture, propose Jean-Louis sans réfléchir.
  • En tant que capitaine, je dois être la dernière à quitter le navire, s’excuse Janine. Elle a compris que la proposition ne s’adressait pas à elle, mais elle tient à conserver un minimum de dignité.
  • Pourquoi pas. Corine, interroge Fabien ?
  • Allez.

Et voila nos trois compères repartis sur le sentier de la guerre.

La nuit est froide. Ça sent le bois pourri le long des berges. Et le haricot vert aussi. Ça doit provenir des poubelles. Heureusement, Jean-Louis n’est pas garé très loin. Fabien n’a pas l’habitude de se promener les guiboles à l’air en plein hiver.

La playlist de Jean-Louis démarre en même temps que la voiture. Le swing s’infiltre entre les muscles fatigués des passagers. Corine est assise à l’avant. Derrière elle, Fabien encercle son siège des bras et pose les mains sur ses hanches, le temps d’une danse assise. Elle se frotte les cuisses en rythme, l’une contre l’autre, comme une cigale de Corée du Sud.

Les phéromones de Jean-Louis saturent l’habitacle étroit de la Twingo. Gênée, Corine pose sa main gauche sur celle de Fabien pour masquer la présence de celle-ci à Jean-Louis. Mais l’ascenseur de Jean-Louis fonce dans la nuit sans étoiles. Il repense à la soirée, à Jocelyne et Isabelle, à Fabien et Corine, à Janine et aux perroquets en balsa31. Toute la jungle est en éveil. Il a compris qu’il est trop tard, que la machine hormonale est devenue incontrôlable.

Prenant la main posée sur la sienne pour un encouragement, Fabien glisse sa main droite sous les fesses de Corine. C’est chaud, c’est doux, c’est tendre, c’est trempé. La culotte de Corine lui rentre dans la raie. Tout le monde descend32. Fabien se demande comment Jean-Louis va réagir quand il va découvrir la tâche sur le siège de sa bagnole.

  • C’est là, au numéro vingt.

Jean-Louis se gare. Fabien n’ose pas retirer sa main droite.

  • Vous montez goûter la prune que j’ai rapportée des Vosges ?

C’est sorti tout seul. Sans prévenir. Jean-Louis jette un coup d’œil à Fabien qui opine de la cloche33.

  • Ok mais il faut que je puisse conduire. Je ne veux pas prendre une prune.
  • Quand le permis est à points, il faut le boire, assure Fabien.
  • Qui vole une prune vole la lune34, renchérit Corine.

Fabien laisse ses deux collègues passer devant car sa robe ne lui permet pas de dissimuler sa formidable érection. Dans l’ascenseur, il se tourne vers le miroir.

  • Mon rimmel a coulé.
  • C’est du khôl. Le rimmel c’est pour les cils, rectifie Corine.

L’appartement n’est pas grand mais il est mignon. Il n’y a pas d’autre solution que de se caller à trois dans le canapé-lit. Corine retrousse la robe de Fabien et empale son con gluant.

  • Il était temps, c’est Vincennes.
  • Les grandes eaux, c’est Versailles. Vincennes, c’est le grand zoo, rectifie Fabien.

Elle contemple le beau visage de l’informaticien dont le regard se trouble. Les coulures de khôl font ressortir le grain de sa peau délicate. Heureusement qu’il est efféminé, sinon sa beauté serait insupportable, pense l’Amazone de sa monture.

  •  Viens Jean-Louis, on a besoin que quelqu’un marque le tempo, invite Corine avec la cambrure de l’éloquence.

Mais Jean-Louis a perdu sa moustache. Elle est consignée. Il ne sait pas s’il l’avait encore lorsqu’il est sorti de la voiture.

  • Une étoile de mer est demandée, porte 235. Je répète. Une étoile de mer est demandée, porte 2.

Il est persuadé de l’avoir aperçue en réglant le rétroviseur. Elle est peut-être tombée dans l’ascenseur lorsque Corine l’a furtivement embrassé sur la bouche.

  • Qu’est-ce que tu fous, Jean-Louis ?
  • Je cherche ma moustache. Tu ne sais pas où elle est ?

Je laisse au lecteur, l’honneur de la dernière réplique de Corine. En trois mots. Vous avez huit minutes (c’est la durée moyenne d’une conversation36).

Aux origines du conte

J’avais depuis longtemps l’idée d’un personnage masculin très laid mais doté d’un pouvoir singulier consistant à émettre à son insu des phéromones irrésistibles. En sa présence, les femmes se troublent, des couples improbables se forment. Sa laideur l’excluant de facto de la fête, le héros parviendra-t-il à tirer son épingle du jeu ?

Le ressort me semblait fécond en situations inattendues et en malentendus. Cette idée n’est pas sans rappeler la BD, Le déclicUne femme sous influence, de Milo Manara (1984).

D’autre part, c’était l’occasion d’explorer l’hypothèse que les unions arrangées, ici provoquées, ne sont pas les pires, tant il semble que les humains guidés par l’amour s’assemblent pour mieux se désunir.

J’ai fini par lancer mon traitement de texte préféré pour écrire une histoire dont la légèreté n’exigeait pas un roman. Un conte écrit au présent de l’indicatif serait le cadre nécessaire et suffisant de ce fait-divers.

Ma surprise fut grande lorsque je lu ces mots en haut de la page vierge : « Sélectionnez l’icône ou appuyez sur Alt + i pour faire un brouillon avec Copilot ». C’était nouveau. En cliquant sur l’icône, en haut à droite de la barre d’outils, j’appris que mon abonnement Microsoft 365 me donnait droit à un crédit IA. L’outil me proposait d’écrire un brouillon. Je lui demandai de m’écrire un conte, sans préciser de sujet. C’est ainsi que j’entrai en possession d’un scénario très générique. J’ai conservé certains titres dans le conte que vous venez peut-être de lire : Le souhait de la princesse, Les mystères de la vallée enchantée, Le défi de la gardienne des rêves et Une rencontre inattendue. La trivialité de mes propos associée à la mièvrerie de ces titres me semblait prometteuse.

Mais je ne conservai aucune des propositions qui bien sûr n’avaient aucun rapport avec mon sujet.

Vous connaissez a priori la suite.

yiaho

La technique

Après avoir écrit le conte, l’outil Copilot m’ayant donné l’idée d’aller voir du côté de ChatGPT, je me suis rendu sur yiaho.com, rubrique « écrire un livre ».

J’ai entré la demande suivante :

« C’est l’histoire d’un comptable très laid qui a la faculté de déclencher à son insu l’excitation chez les femmes. Mais les femmes ne conçoivent pas que cet homme très laid soit à l’origine de leur excitation. Elles tournent donc leur désir vers l’homme au physique acceptable qui se trouve à proximité, croyant leur attraction sincère. Cela cause des quiproquos. »

yiaho me fit la réponse suivante, assortie d’une dizaine de chapitres et de leurs résumés : « C’est une idée originale et prometteuse pour une histoire ! Voici une proposition de trame et de chapitres pour développer ce récit. »

### Titre : L’étrange charisme du laid

  • Remarque : on est déjà à côté de la plaque ! Il ne s’agit pas de charisme.

### Trame :

**Contexte :**  

L’histoire se déroule dans une petite ville où la vie quotidienne est rythmée par l’arrivée de nouveaux employés au sein d’une entreprise locale. Le personnage principal, Marcel, est un comptable peu séduisant, dont l’apparence ne cesse de provoquer moqueries et railleries.

**Personnages principaux :**  

**Marcel :** Le comptable laid, aux manières maladroites, mais au grand cœur

  • Remarque : on est déjà à côté de la plaque ! Il n’est question ni de maladresse ni de grand cœur !

**Sophie :** Une collègue séduisante et pleine de vie, qui commence à ressentir une inexplicable attraction pour Marcel.  

  • Remarque : on est déjà à côté de la plaque ! Sophie n’est pas attirée par Marcel mais excitées à son insu par la présence de Marcel !

**Julien :** Un homme charismatique et séduisant, qui attire toutes les femmes, y compris celles qui sont secrètement fascinées par Marcel.

  • Remarque : on est déjà à côté de la plaque ! Les femmes ne sont pas secrètement fascinées par Marcel mais excitées à leur insu par la présence de Marcel !

**Claire :** La meilleure amie de Sophie, qui essaie de la convaincre de son attirance pour Julien.  

### Chapitres :

#### Chapitre 1 : Une apparence trompeuse  

Introduction de Marcel, ses traits peu avantageux et sa vie monotone au travail. Présentation de son quotidien en tant que comptable, de ses relations avec ses collègues, et de son sentiment d’isolement.

#### Chapitre 2 : Le pouvoir insoupçonné  

Marcel se rend compte, par un malheureux incident, qu’il cause une étrange réaction chez certaines femmes. Il ne comprend pas ce phénomène et l’attribue à des coïncidences.

#### Chapitre 3 : Les quiproquos commencent  

Sophie, perplexe, se sent attirée par Marcel sans vraiment comprendre pourquoi. Elle se tourne vers Julien, persuadée que c’est lui qui est l’objet de son désir. 

#### Chapitre 4 : Le triangle amoureux  

Les tensions montent lorsque Sophie devient de plus en plus proche de Julien, mais ses pensées sont souvent hantées par Marcel. Julien, convaincu d’être le centre d’attention, commence à flirter avec Sophie.

#### Chapitre 5 : Complicité inattendue  

Marcel et Sophie passent du temps ensemble, et une amitié sincère se développe. Mais chaque rencontre engendre un malentendu, car Sophie continue de penser que ses émotions sont dirigées vers Julien.

#### Chapitre 6 : Révélations et confusions  

Un événement majeur, comme une fête d’entreprise, précipite les choses. Les femmes commencent à avouer leur attirance pour Marcel, mais elles le font en créditant Julien de ce qui ne revient qu’à Marcel.

#### Chapitre 7 : La vérité éclate  

Marcel finit par découvrir la nature de ses capacités. En étant confronté à la réalité de son pouvoir, il doit choisir entre embrasser ce côté de lui-même ou rester dans l’ombre.

#### Chapitre 8 : Acceptation  

Sophie, réalisant qu’elle est attirée par Marcel pour ce qu’il est vraiment, se confronte à ses propres sentiments et à ses préjugés. Elle doit faire un choix entre le charme superficiel de Julien et l’authenticité de Marcel.

#### Chapitre 9 : L’amour au-delà des apparences  

Le dénouement où Marcel et Sophie se retrouvent, acceptant leurs sentiments mutuels. Les autres personnages, y compris Julien, doivent faire face à la réalité de leurs propres attirances et illusions.

#### Chapitre 10 : Une nouvelle perspective  

Marcel, désormais sûr de lui, trouve sa place tant au travail qu’en amour. Il comprend que son pouvoir est à la fois une bénédiction et une malédiction, mais qu’il doit l’accepter comme une part de lui-même.

### Conclusion  

Un dernier chapitre qui évoque la manière dont les perceptions physiques peuvent être trompeuses et comment l’authenticité et la connexion émotionnelle sont essentielles pour bâtir de vraies relations.


Les déconvenues

Je n’ai pas été emballé par ce scénario sans surprises quoique cohérent. Comme l’outil me le proposait, j’acceptai qu’il rédigeât le premier chapitre, puis le deuxième, etc. Après le 10e chapitre, l’outil ne me proposant pas de conclusion mais un 11e chapitre, je lui demandais pourquoi. Il me répondit qu’il attendait d’avoir une conclusion satisfaisante. J’avais l’impression qu’il m’embarquait dans une série sans fin. J’ai continué mais, après le 17e chapitre, je lui ai demandé de conclure en trois chapitres.

Voici les vingt titres des chapitres de la version d’yiaho qui totalise 60 pages rédigées :

  1. Une apparence trompeuse
  2. Le pouvoir insoupçonné
  3. Les quiproquos commencent
  4. Le triangle amoureux
  5. Complicité inattendue
  6. Révélations et confusions
  7. La vérité éclate
  8. Acceptation
  9. Les échos du passé
  10. La tempête
  11. Au bord de l’abîme
  12. Le face-à-face
  13. Les conséquences
  14. Les choix difficiles
  15. Une lueur d’espoir
  16. Les vérités révélées
  17. La tempête se lève
  18. La confrontation finale
  19. Un nouveau départ
  20. L’avenir radieux

Les titres des huit premiers chapitres sont conformes à la proposition de départ en 10 chapitres. Au chapitre 8, Sophie a choisi Marcel. Ce choix ne sera jamais remis en question. Il aurait donc été temps de conclure. Au lieu de s’acheminer vers la conclusion, yiaho relance l’intrigue avec un chapitre 9 « Les échos du passé » où on apprend que le rival, Julien, n’a pas lâché l’affaire (contrairement à ce que pouvait augurer le titre « Les échos du passé« , aucune révélation n’est faite sur le passé des personnages).

Au chapitre 14, « Les choix difficiles« , on apprend que Julien n’a toujours pas lâché l’affaire. Ca tourne en rond.

Au chapitre 17 « La tempête se lève« , on apprend que Julien n’a toujours pas lâché l’affaire. Ca ronronne doucement autour de Julien l’éconduit.

Il n’est plus question depuis longtemps des super-pouvoirs de Marcel. Son super-pouvoir a été remplacé dès le chapitre 3 « Les quiproquos commencent » par « quelque chose d’authentique et de rafraîchissant« . Une sorte de beauté intérieure. Ce qui permet à yiaho d’installer « Le triangle amoureux » dès le chapitre suivant et de s’y cantonner jusqu’au 20e et dernier chapitre. Dès le départ (cf. les personnages) yiaho s’est orienté vers le scénario qu’il maîtrisait s’approchant le plus de ma demande.


Voici quelques extraits de la rédaction de la version de 60 pages. Il est clair que l’IA va piocher dans le corpus des textes existants, toutes catégories confondues. Cela donne une idée de la qualité moyenne des textes :

Hors sujet
  • « Mais ce qu’il ne savait pas, c’était que sa présence, son naturel, et même son apparence unique, créaient effectivement une attraction inexplicable. » : il ne s’agit pas de ça. yiaho n’en fait qu’à sa tête !
  • « Le lendemain matin, alors que Marcel était de retour à son bureau, il remarqua une atmosphère légèrement différente. Les femmes semblaient s’agiter un peu plus autour de lui, échangeant des regards et des murmures. » : Marcel a toujours eu son pouvoir. L’effet n’est donc pas censé être nouveaux. En outre, rien ne l’a déclenché.
  • « tu ne le sais pas, mais tu as quelque chose d’authentique et de rafraîchissant, Marcel » : il ne s’agit pas de ça. yiaho n’en fait qu’à sa tête !
Confusions, paradoxismes et manque de clarté
  • « Lorsqu’il entra dans la cuisine, il trouva Sophie, la nouvelle recrue, à côté de Claire. » : c’est la première fois qu’il la voit et il ne la cherche pas, alors pourquoi la trouve-t-il ?
  • « Les rires et les conversations continuaient, mais au fond, une étincelle de curiosité grandissait chez lui. » : pourquoi mais puisqu’il n’y a aucun antagonisme entre les conversations et sa curiosité ? Par ailleurs, une étincelle ne saurait grandir.
  • « Il réussit à balbutier un « Bonjour » avant de se concentrer sur le café qu’il essayait de verser dans son gobelet, se maudissant intérieurement de ne pas avoir pris une tasse. » : Marcel n’est pas handicapé ; le problème du gobelet versus la tasse n’a pas de sens.
  • « Sans qu’il ne s’en rende compte, alors qu’il s’efforçait de se faire oublier, un élément étrange commençait à perturber la dynamique de la pièce. L’attention des femmes présentes semblait tourner vers lui, mais pas pour les raisons qu’il aurait espérées. À son insu, son apparence peu engageante se mêlait à une aura inexplicable qui commençait à susciter l’intérêt, mais pas envers lui. » 
    • L’attention des femmes présentes semblait tourner vers lui :
      • Utilisation étrange de tourner.
      • Il est impossible que L’attention des femmes se tourne vers lui
    • mais pas pour les raisons qu’il aurait espérées : Marcel n’espère rien
    • une aura inexplicable qui commençait à susciter l’intérêt, mais pas envers lui : paradoxisme maladroit et peu clair.
  • « Marcel se sentit dépossédé, comme si on lui avait retiré une part de lui-même qu’il ne savait même pas qu’il possédait. » : trop fort !
  • « « Hé, Sophie ! Tu viens de la machine à café ? » demanda-t-il » : La personne qui dit cela entre dans la cuisine où se trouve la machine à café !
  • « des ombres dorées » : oxymore poétique involontaire !
Répétitions des situations
  • Chapitre 2 : « J’ai besoin de ton aide concernant un projet avec les chiffres. Je me débat un peu avec ça. Si tu pouvais jeter un œil… »
  • Chapitre 3 : « Euh… je voulais juste te demander si tu pouvais m’aider avec un chiffre dans le rapport que je dois rendre, mais… »
Poncifs
  • « Avec son nez proéminent, ses lunettes à la monture épaisse et ses cheveux bruns en bataille, il avait souvent l’impression d’être le personnage d’un roman mal écrit. » : les canons de la laideur sont donc un nez proéminent, des lunettes à la monture épaisse (donc des verres à l’avenant), des cheveux bruns difficiles à coiffer. Une carricature du juif telle qu’elle macère dans les esprits les plus obscurs !
  • « son sourire éclatant illuminant la pièce. »
  • « son charme naturel illuminant la pièce. »
  • « son charisme naturel illuminant la cuisine. »
  • « il y avait une lueur d’inquiétude dans ses yeux. »
  • « la tête pleine de pensées contradictoires. »
  • « il avait l’impression de naviguer dans un océan de confusion. »
  • « se retrouvait au centre d’un tourbillon d’émotions. »
  • « Il retourna à son bureau, le cœur lourd. »
  • « Le cœur de Marcel battait la chamade. »
  • « La tension dans l’air était palpable. »
  • « La tension entre lui et Sophie devenait de plus en plus palpable. »
  • « l’instant semblait suspendu dans le temps. »
  • « Sophie prit une profonde inspiration. »
  • « alors qu’il s’installait dans son canapé avec une tasse de thé. »
  • « leurs mains se frôlant presque. »
  • « ils se retrouvèrent au café du coin. »
  • « Je veux quelqu’un de vrai, quelqu’un qui est lui-même. »
Lourdeurs et maladresse
  • « La réalité était qu’il était en train de faire exactement ce qu’il avait toujours aimé. »
  • « comprendre une énigme. » : au lieu de résoudre.
  • « tout cela ne faisait que renforcer l’idée qu’il était un outsider. » : au lieu de looser.
  • « comme une ligne tendue prête à céder à la première étincelle. » : mélange de deux expressions, entre rupture et explosion.
  • « ses pensées étaient constamment interrompues par l’anticipation du moment qu’ils partiraient ensemble. » : constamment interrompues au lieu de régulièrement interrompues ; qu’ils au lieu de ils.
  • « leurs rires résonnant dans l’air. » : participes présents systématiques, lourds et trop nombreux.

Je m’arrête là, je n’ai pas tout relevé et je n’en suis qu’au chapitre 5.


Ultérieurement, j’ai fourni à l’outil un scénario détaillé avec une description précise des personnages et de leurs interactions.

J’ai demandé une version en 10 chapitres, puis une version en 20 chapitres. Dans les deux cas, l’outil ne ma fourni que les résumés des chapitres reprenant mes consignes, sans me proposer de développer davantage chaque chapitre.

Soit l’outil se limite quand on lui fournit trop de contraintes, soit l’outil m’a limité car j’avais épuisé mon crédit IA, soit je m’y suis mal pris. J’ai lâché le morceau.


Copilot

La technique

Ne désirant pas rester sur un échec, je revins à Copilot, l’outil de Microsoft intégré à Word, décidé à jouer le jeu.

  1. J’ai demandé à Copilot de me proposer un conte.
    • La première version (une page) proposait une rencontre entre un prince, une étoile pour se débarrasser d’un méchant sorcier.
  2. Je demandai à Copilot d’ajouter une princesse jalouse.
  3. Puis un ennemi redoutable empêchant d’accéder à l’étoile (le rat)
  4. Puis une menace nouvelle, une fois la stabilité revenue (le fils du rat)
  5. Enfin, une suite possible (l’enfant prodigieux).

Puis je réécris le tout, ajoutant de nouvelles idées en cours de route :

  • la princesse suit le prince et lui vole la vedette
  • le dragon
  • le manège
  • les péripéties sentimentales
  • la dragonne
  • les poils de Malakar et les matelas
  • l’ambiguïté du crapaud, etc.

J’ai également remplacé certains mots et changé l’ordre de certaines phrases.

Exemples

Exemple 1 :

  • Un soir, alors qu’il contemplait le ciel étoilé depuis la tour du château, une étoile filante particulièrement brillante attira son attention. Elle laissa derrière elle une traînée d’or scintillante, comme une traînée de poudre magique, et sembla tomber au-delà des mystérieuses montagnes qui bordaient son royaume. Curieux, Alaric décida de partir à la recherche de cette étoile intrigante.

Va devenir :

  • Un soir, alors qu’il contemplait le ciel étoilé depuis la tour du château, une étoile filante particulièrement lumineuse attira son attention avant de disparaître par-delà les montagnes qui bordaient le royaume. Elle avait laissé derrière elle une traînée scintillante qui s’était transformée doucement en une fine pluie de poudre d’or. Excité comme un chat dépourvu de poils, Alaric décida de partir à la recherche de cette étoile mystérieuse.

Exemple 2 :

  • Pendant des mois, Lumio apprit à Élyan les chants et les rituels ancestraux, lui montrant les constellations et leur signification. Le jeune garçon, ébloui par ces connaissances, ressentit un appel profond vers le ciel.

Va devenir :

  • Pendant des mois, Lumio apprit à Élyan les chants et les rituels ancestraux, lui révélant les secrets des constellations. Ebloui par ces connaissances, le jeune garçon ressentit des picotements au sommet du crâne et conçut une fascination pour les voutes étoilées.

Exemple 3 :

  • Après plusieurs jours de voyage, Alaric atteignit une vallée secrète, baignée d’une lumière douce et dorée. Cependant, avant de pouvoir atteindre l’étoile, il devait affronter une créature redoutable : un rat mangeur d’étoiles qui rôdait aux alentours. Ce rat géant, à la fourrure noire et aux yeux brillants, se nourrissait de la lumière des étoiles, les absorbant pour renforcer sa propre puissance. Alaric dégaina son épée et engagea un combat acharné contre la bête. Avec agilité et détermination, il parvint à vaincre le rat, libérant ainsi la lumière des étoiles qu’il avait dévorées.

Va devenir :

  • Après plusieurs jours de voyage, Alaric atteignit une vallée baignée d’une lumière dorée. Un rat géant mangeur d’étoiles rôdait alentour. Il fallut l’affronter. Cette créature redoutable à la fourrure noire et aux yeux brillants, se nourrissait de la lumière des étoiles, les absorbant pour renforcer sa puissance. Alaric dégaina son épée et engagea un combat acharné contre la bête fumante. Avec agilité et détermination, il parvint à crever les yeux du rat, libérant ainsi la lumière des étoiles qu’il avait dévorées.

Enfin, il a fallu se poser des questions sur la condescendance protectrice de l’aristocratie envers le petit peuple. Le schéma protecteur familial, intégré par les enfants, est étendu dans le conte à la société toute entière. Cet enseignement de la soumission semble être une spécialité de l’intelligence artificielle. Dans les contes traditionnels, la famille est le lieu de tous les dangers et les héros sont rarement des aristocrates.

Dans le conte proposé par Copilot, les héros sont des aristocrates qui gouvernent avec sagesse, amour et bienveillance pour le bien de leur peuple.

J’ai réfléchi à des alternatives :

  • Transformer les héros en gens du peuple
  • Assumer la férocité des héros envers le peuple
  • Assumer l’esclavage.
  • Assumer la férocité des hommes, toutes classes confondues.

J’ai choisi de rester dans le schéma paternaliste proposé par Copilot, en assumant l’esclavage et la férocité des héros envers le peuple.

Exemples

Exemple 1 :

  • Alaric était connu pour son cœur généreux. Il adorait passer ses journées à explorer les forêts enchantées.

Va devenir :

  • Alaric était connu pour sa générosité et son espièglerie. Il passait ses journées à explorer les forêts enchantées et à effrayer les villageois du royaume. Sa dernière plaisanterie avait consisté à déposer une pièce d’or dans le nid d’une poule. En découvrant la pièce, le paysan cru qu’il possédait une poule merveilleuse. Heureusement, la poule ne pondit qu’une seule pièce. En effet, n’étant pas autorisé à quitter sa campagne, le paysan n’avait pas la possibilité d’utiliser cet or. Il craignait par ailleurs qu’on le découvrit en sa possession. Il aurait alors été accusé de vol et pendu. Il eut la sagesse de jeter la pièce dans la rivière et de manger la poule.

Exemple 2 :

  • Le royaume fut sauvé et les villageois acclamèrent Alaric comme un héros. Les jours sombres furent remplacés par une ère de paix et de prospérité. Alaric, désormais roi, gouverna avec sagesse et bienveillance. L’épée de Luminara fut placée dans un sanctuaire, rappelant aux générations futures le pouvoir de la lumière et du courage.

Va devenir :

  • Le royaume était sauvé et les villageois, ruinés mais en vie, acclamèrent Élodie et Alaric en héros. Les jours sombres firent place à une ère glorieuse de prospérité économique et d’effervescence affective. Alaric, désormais roi, gouverna avec pragmatisme, sans pour autant se départir de son esprit facétieux. L’épée de Luminara fut placée au centre d’un grand manège, dans le but de rappeler aux enfants de la cour, le pouvoir de la lumière et de la bravoure. Les enfants des serfs avaient accès au manège une fois l’an, la nuit de la Saint-Jean.

Exemple 3 :

  • Alaric et Élodie gouvernèrent le royaume avec sagesse, unissant leurs forces et leurs cœurs pour le bien de leur peuple.

Va devenir :

  • Alaric et Élodie gouvernèrent le royaume avec sagesse et fermeté, unissant leurs forces et leurs cœurs pour le bien de leur proches.

Exemple 4 :

  • Plus unis que jamais, Alaric et Élodie poursuivirent leur règne avec sagesse et amour.

Va devenir :

  • Plus unis que jamais, Alaric et Élodie poursuivirent leur règne avec succès.

L’Étoile à matelas (un conte)

Il était une fois, dans un royaume pas si lointain, un jeune prince du nom d’Alaric. Enfant, Alaric était connu pour sa curiosité et son espièglerie. Il passait ses journées à explorer les forêts enchantées et à effrayer les villageois du royaume. On raconte qu’un jour il déposa une pièce d’or dans le nid d’une poule. En découvrant la pièce, le paysan cru qu’il possédait une poule merveilleuse. Heureusement, la poule ne pondit qu’une seule pièce. En effet, n’étant pas autorisé à quitter sa campagne, le paysan n’avait pas la possibilité d’utiliser cet or. Il craignait par ailleurs qu’on le découvrit en sa possession. Il aurait alors été accusé de vol et pendu. Il eut la sagesse de jeter la pièce dans la rivière et de manger la poule.

Dans ce royaume vivait une princesse capricieuse nommée Élodie. Belle comme un lundi, Élodie avait cependant un caractère difficile et changeant. Elle exigeait toujours le meilleur et le pire et trouvait des défauts là où il n’y en avait pas encore. Bien que le comportement de la princesse irritât toute la cour, Alaric s’amusait à faire de son mieux pour plaire à Élodie la casse-couilles.

Un soir, alors qu’il contemplait le ciel étoilé depuis la tour du château, une étoile filante particulièrement lumineuse attira l’attention du prince, avant de disparaître par-delà les montagnes qui bordaient le royaume. Elle avait laissé derrière elle une traînée scintillante qui s’était transformée doucement en une fine pluie de poudre d’or. Excité comme un chat dépourvu de poils, Alaric décida de partir à la recherche de cette étoile mystérieuse.

Le lendemain matin, il sella Arion, son destrier préféré, et se mit en route. La traversée des montagnes ne fut pas aisée. Les pentes escarpés se ressemblaient étrangement et les vents soufflaient avec une force peu commune. Mais rien ne pouvait détourner le prince de sa quête.

Avant son départ, jalouse de ses aventures, la princesse Élodie avait tenté de faire renoncer le prince à son voyage.

  • Pourquoi gaspilles-tu ton temps en quêtes insensées, s’était-elle exclamée avec fureur ? Ton devoir est ici, dans ton royaume, près de moi !

Ses protestations n’avaient pas entamé la détermination d’Alaric.

  • Il me faut suivre cette étoile, Élodie. Quelque chose d’extraordinaire se prépare, et je dois le découvrir.

Cédant à sa jalousie, Élodie avait décidé de suivre Alaric en secret. Elle avait enfilé un manteau sombre comme le cul d’un loup et était partie à la poursuite du prince, non sans avoir pris soin d’emballer les sabots de sa monture dans des sacs en toile de jute37.

Après plusieurs jours de voyage, Alaric atteignit une vallée baignée d’une lumière dorée. Un rat géant mangeur d’étoiles rôdait alentour. Il fallut l’affronter. Cette créature redoutable, à la fourrure sombre, se nourrissait de la lumière des étoiles, les absorbant pour renforcer sa puissance. Elle était d’autant plus effrayante qu’elle possédait un œil unique situé au-dessus de son museau. Alaric dégaina son épée et engagea un combat acharné contre la bête fumante. Heureusement, la chance était de son côté. Un rayon de soleil reflété par la lame de son épée abusa la bête qui, croyant entrevoir l’aubaine d’un repas, vint empaler son globe noir sur la pointe acérée que le prince lui tendait. La lumière des étoiles qui avait été dévorées s’échappa de l’œil crevé du rat et la bête mourut dans une odeur pestilentielle.

Au centre de la vallée, Alaric trouva l’étoile, délicatement posée sur un lit de cottons-tiges. Elle n’était pas faite de métal ou de pierre, mais constituée d’ambre et de pure lumière, comme un bouchon de cérumen de ragondin.

S’approchant de l’étoile, il entendit une voix mélodieuse.

  • Oh, noble prince, merci d’être venu jusqu’à moi et de m‘avoir délivrée de cet affreux rat des marais. Saviez-vous que les étoiles avaient peur des rats ?
  • Le gigantisme de celui-ci était propre à inspirer la crainte à n’importe quelle créature vivante, relativisa le prince.
  • Mais je ne suis pas n’importe quelle créature vivante, s’offusqua l’étoile ! Je suis Luminara, une étoile alpha de la constellation du Centaure. J’ai été envoyée sur Terre pour aider le héros au cœur pur qui aurait le courage nécessaire pour protéger le monde des ténèbres imminentes.
  • Mes excuses, Madame Luminara. Alaric, pour vous servir, répondit le prince en s’inclinant.
  • Votre combat contre le rat a prouvé que vous ne manquez ni de force ni d’audace. Vous m’avez tout l’air d’être l’homme de la situation, mon cher Alaric !

Pendant son voyage qui avait duré quatre ans, Luminara avait pris le temps de bosser son Terrien sans peine. Un sourire entendu au bord des lèvres, Alaric accepta la mission de l’étoile en même temps que le compliment. Luminara expliqua à Alaric que les forces des ténèbres, dirigées par le redoutable sorcier Malakar, étaient sur le point d’envahir le royaume. Seul un cœur pur avait le pouvoir de manier la lumière de l’étoile pour repousser ces forces maléfiques.

  • Ce cœur pur est unique. Est-ce bien celui qui est logé dans ta poitrine, Alaric ?
  • Certainement, Madame.
  • Tu es venu seul ?
  • Je ne vois personne d’autre.
  • Parfait. Dépêchons-nous car ce rat mort pu horriblement.

Luminara commença par transformer Arion en un dragon cracheur de feu, dernière génération.

  • Ça peut toujours servir !

Puis elle fusionna avec l’épée d’Alaric encore tachée du sang du rat, transformant ainsi l’arme en un outil d’une puissance phénoménale.

Armé de son épée enchantée et chevauchant le dragon, Alaric prit la direction de son royaume avec un sentiment de devoir à accomplir.

En chemin, alors qu’Alaric s’était arrêté à mille milles de toute terre habitée38 pour réparer une avarie de son dragon, Élodie déroba discrètement l’épée. Elle pensait qu’une fois l’arme magique en sa possession, elle pourrait obliger Alaric à demeurer auprès d’elle.

Au terme de son voyage, Alaric trouva son royaume assiégé par les créatures des ténèbres. Les villageois, épouvantés s’étaient réfugiés dans la cour du château. La main crispée sur son fourreau vide, Alaric réalisa que, privé de l’épée, la défaite était inévitable.

Face à la gravité de la situation, Élodie brandit l’arme scintillante et se lança dans la bataille.

  • Pardonne-moi, Alaric. J’ai agi par égoïsme. J’avais peur de te perdre.

Avec un sourire bienveillant de garçon vacher taciturne, Alaric accepta les excuses de la princesse et lança son dragon sus à l’ennemi.

La lumière de l’épée repoussait les créatures des ténèbres, consumant leur essence maléfique et purifiant la terre autour d’elle. Crachant des flammes formidables, le dragon carbonisait avec une efficacité redoutable les montures de l’ennemi et le matériel poliorcétique déployé à grands frais par Malakar.

Voyant son armée en déroute, le sorcier décida d’affronter la princesse en personne. Malakar lança des sorts puissants, mais la lumière de l’épée les dissipa avec une facilité confondante. Il apprit à ses dépens qu’il n’y avait qu’une seule élue et qu’elle s’appelait Élodie.

Après une bataille épique, la princesse parvint à vaincre Malakar. Cependant, au lieu de le tuer, Élodie, qui n’était pas insensible à la prestance du magicien, choisit de lui pardonner.

  • Malakar, tes actions étaient motivées par l’ignorance et la paranoïa. Je te pardonne et t’offre une chance de te racheter.

Impressionné par les connaissances en psychologie d’Élodie, Malakar accepta et jura de ne plus jamais utiliser la magie noire. Alaric applaudit et témoigna sa confiance à Malakar en l’invitant à rester et à utiliser ses pouvoirs pour participer à la reconstruction.

Le royaume était sauvé et les villageois, ruinés et traumatisés, acclamèrent Élodie et Alaric en héros. Les jours sombres firent place à une ère glorieuse de prospérité économique et d’effervescence affective39. Désormais roi, Alaric gouverna avec pragmatisme, sans pour autant se départir de son esprit facétieux. L’épée de Luminara fut placée au centre d’un grand manège, dans le but de rappeler aux enfants de la cour, le pouvoir de la lumière et de la bravoure. Les enfants des serfs avaient accès au manège une fois l’an, la nuit de la Saint-Jean.

Bien que toujours sujette à l’irritation, la princesse finit par reconnaître les qualités de son roi. Elle apprit à contrôler ses humeurs et devint une conseillère précieuse de sa majesté, ajoutant une touche de charme et de fantaisie dans les rangs de la garde rapprochée. Lorsqu’elle montait sur ses grands chevaux, le roi l’appelait Eludie40 pour la taquiner tout en la flattant.

Élodie et Malakar passèrent beaucoup de temps ensemble pendant la reconstruction du royaume. Ils développèrent l’un pour l’autre une affection inattendue et finirent par se marier, unissant ainsi, selon Malakar, les forces de la lumière et de la magie.

Comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, la nuit de la Saint-Jean suivante, un miracle advint au centre du manège. L’épée de Luminara se mit à briller intensément, puis une belle paysanne nommée Lysandra apparu. Emprisonnée jadis dans un pigeon par Malakar à qui elle avait refusé son cœur, elle avait été libérée par le pouvoir de l’épée en venant se percher sur le manège. Impressionné par la beauté et la gentillesse de Lysandra, Alaric tomba éperdument amoureux d’elle, malgré l’interdiction qu’il avait d’épouser une paysanne.

Voyant cette nouvelle relation s’épanouir entre Alaric et Lysandra, Élodie devint de plus en plus jalouse. En outre, ses tentatives de contrôle sur Malakar commençaient à gonfler le magicien. Un jour, après une dispute particulièrement violente, Malakar décida de quitter Élodie et de se rapprocher de Lysandra, dont il appréciait la douceur et la compréhension. Lysandra céda à Malakar pour rendre jaloux Alaric qui refusait de l’épouser.

Contre toute attente, Lysandra découvrit en Malakar un amant formidable. Une fois le divorce avec Élodie consommé, Malakar demanda au roi la main de Lysandra.

Voyant que Lysandra et Malakar étaient faits l’un pour l’autre, Alaric leur accorda sa bénédiction. Ils se marièrent rapidement, créant une alliance puissante et harmonieuse entre la lumière de Lysandra et la magie de Malakar le baratineur.

Après cette débâcle sentimentale, Alaric et la princesse Élodie prirent conscience de leurs erreurs et se pardonnèrent mutuellement. Leur amour qui ne s’était jamais éteint s’en trouva renforcé, et ils décidèrent de se remettre ensemble. Alaric et Élodie gouvernèrent le royaume avec sagesse et fermeté, unissant leurs forces et leurs cœurs pour le bien de leur proches.

Pendant ce temps, le dragon d’Alaric souffrait d’une profonde dépression. Conscient que sa santé mentale était en jeu, il fit une demande spéciale à Malakar.

  • Sorcier, pourrais-tu utiliser ta magie pour transformer cette jument en dragonne ? Je souhaite vivre heureux et fonder une famille avec elle.

Touché par cette demande sincère, et sensible au titre de sorcier, Malakar accepta et utilisa ses pouvoirs pour transformer la jument en une magnifique dragonne. Le dragon et la dragonne vécurent heureux et eurent beaucoup de dragonneaux, apportant joie et émerveillement dans tout le pays.

Alors que la paix semblait régner sur le royaume, une nouvelle menace surgit. Avide de venger la mort de son père, le fils du rat mangeur d’étoiles, un être sinistre plus puissant et rusé encore que son géniteur, enleva un bébé dragon pour attirer Alaric dans un piège.

Accompagné d’Élodie, de Malakar et de Lysandra, le roi laissa le royaume sous la garde des dragons et se lança dans une nouvelle quête pour sauver le petit dragon. Ensemble, ils affrontèrent de nombreux dangers. Les épreuves surmontées renforcèrent leur courage et leur amitié. Les rats ne craignaient pas la puissance de l’étoile mais grâce à leur détermination et à l’aide de la magie de Malakar, les quatre compagnons parvinrent à déjouer les plans du fils du rat mangeur d’étoiles et à libérer le bébé dragon.

Le fils du rat fut transformé par Malakar en un énorme cochon qui fut ensuite offert aux villageois qui se le partagèrent lors d’un grand festin destiné à célébrer le retour des héros.

Plus unis que jamais, Alaric et Élodie poursuivirent leur règne avec succès, tandis que le dragon et la dragonne veillèrent sur leur progéniture avec une attention renouvelée.

Toutefois, lors du combat, Malakar avait été mordu par le fils du rat. Sa blessure s’était refermée mais son sang avait été contaminé d’une étrange façon. La nuit tombée, des poils lui poussaient sur tout le corps. Cela ne laissait pas d’amuser Lysandra qui avait passé plusieurs années couverte de plumes.

Au levé du jour, Lysandra utilisait les poils tombés pour bourrer des matelas dont elle faisait commerce. Ainsi, personne ne su jamais le mal étrange dont souffrait son mari41.

Mais un mal bien plus grand menaçait le royaume. L’épée tâchée du sang du rat mangeur d’étoile donnait naissance à des rats toujours plus nombreux qui consommaient les récoltes. Année après année, les disettes se succédaient, mettant en péril le royaume tout entier.

Heureusement, Lysandra et Malakar donnèrent naissance à un enfant exceptionnel, une étoile incarnée sous forme humaine qu’ils nommèrent Élyan.

Malgré son cheveux sur la langue et le poil qu’il avait dans le creux de la main, Élyan montra, dès son plus jeune âge, des capacités extraordinaires et une sagesse étonnante.

Vers l’âge de 13 ans, alors qu’il explorait une forêt enchantée, Élyan se lia d’amitié avec un crapaud aux yeux scintillants comme des étoiles. Ce crapaud nommé Lumio parlait plusieurs langues et semblait connaître les secrets de l’univers.

Un soir, sous la lumière argentée de la lune, Lumio révéla à Élyan un mystère très ancien.

  • Élyan, dit le crapaud, tu es destiné à veiller sur ce royaume depuis les cieux. Je vais t’enseigner comment regagner ta place parmi les étoiles pour protéger et guider ton peuple.

Pendant des mois, Lumio apprit à Élyan les chants et les rituels ancestraux, lui révélant les secrets des constellations. Ebloui par ces connaissances, le jeune garçon ressentit des picotements au sommet du crâne et conçut une fascination pour les voutes étoilées.

Enfin, un soir d’équinoxe, après avoir achevé son apprentissage, Élyan fit ses adieux à ses parents et à ses amis. Chargé de l’épée, il se rendit au sommet de la plus haute montagne du royaume, guidé par Lumio. Là, sous un ciel parsemé de milliards d’étoiles, Élyan récita les paroles sacrées enseignées par le crapaud. Sa forme humaine fusionna avec l’épée et se mit à briller d’une lumière aveuglante. Puis, doucement, elle s’éleva vers les cieux pour retrouver sa place parmi les étoiles. Foi de crapaud.

Désormais, Élyan veille sur le royaume depuis le firmament, sa lumière guide les voyageurs perdus et apporte espoir et protection à son peuple. Les parents racontent à leurs enfants comment un jour, une étoile a pris forme humaine pour ensuite retourner dans les cieux, afin de les débarrasser des magiciens et des rats, et veiller sur eux à jamais.

On ne revit jamais le crapaud. Mais d’aucuns prétendent avoir aperçu Élyan errer aux confins tourbeux de la forêt enchantée, là où vivent les hommes-grenouilles.

Ne manquez pas le deuxième épisode : Les hommes-grenouilles contre-attaquent.


Notes

  1. HRM : human resource manager (responsable des ressources humaines, DRH). Opportunément, HRM est aussi l’hormone de régression müllérienne, responsable du développement harmonieux du fœtus mâle, ainsi que du contrôle du développement des follicules ovariens chez la femme dont elle est un marqueur de la « réserve ovarienne ». Enfin, HRM (High Resolution Melt) est en génétique une technique de biologie moléculaire permettant la détection de mutations. ↩︎
  2. CIO : Chief Information Officer (Directeur des systèmes d’information). En anglais, CIO se prononce si ayo. Ne confondez pas avec CEO qui se prononce si i o ! ↩︎
  3. B to B : business to business (commerce entreprise à entreprise). ↩︎
  4. Vous confondez avec humilité. ↩︎
  5. Jeu de chiffres avec 501, le modèle de jeans emblématique, et 571, le vol Fuerza Aérea Uruguaya 571 qui assurait la liaison entre Montevideo et Santiago. Le 13 octobre 1972, l’appareil s’écrase dans la cordillère des Andes à 3600 mètres d’altitude dans des conditions climatiques difficiles. Les survivants se résolvent à manger les corps des passagers morts, préservés par le froid. ↩︎
  6. Werken ou Wernicke : jeu de mots avec nique et son verlan ken. L’aire de Wernicke est une partie du cerveau humain, localisée dans le lobe temporal gauche, qui joue un rôle dans la compréhension du langage oral et écrit. Une lésion de cette zone provoque chez la personne atteinte un débit de parole fluide mais incompréhensible. ↩︎
  7. RM : resource management (ressources humaines, RH) ↩︎
  8. thanatose : comportement défensif de certains animaux qui consiste en un raidissement total du corps (catalepsie) en présence d’un danger ou d’un contact, dans le but de simuler la mort. ↩︎
  9. CEO : Chief Executive Officier (Président-directeur général, PDG). En anglais, CEO se prononce si i o. Ne confondez pas avec CIO qui se prononce si ayo ! ↩︎
  10. Perséphone : déesse du monde souterrain (les Enfers) également associée au retour de la végétation, au printemps ; chaque année, elle passe huit mois sur Terre puis quatre dans le royaume souterrain avec Hadès (voir tellurique). C’est une enseigne possible pour un opérateur téléphonique. ↩︎
  11. le petit salé : aux lentilles, bien sûr. ↩︎
  12. roquette : polysémie mon amie. ↩︎
  13. mangonneau : du greco-latin manganon « machine de guerre ». Engin militaire offensif à contrepoids fixe de l’époque médiévale, utilisé pour lancer des projectiles contre les murs des châteaux forts. Le tir du mangonneau pouvait se régler beaucoup mieux en hauteur et en distance que celui du trébuchet, car il décrivait un plus grand arc de cercle et qu’il était possible d’accélérer son mouvement. ↩︎
  14. shootguner : réserver. De shotgun (littéralement fusil) : « prem’s » . À l’origine, on crie “shotgun” avant un trajet en voiture pour réserver la place à côté du conducteur. ↩︎
  15. Secrètement : se dit Heimlich en Allemand. Heimlich est aussi le nom du docteur qui inventa le geste de premiers secours permettant la libération des voies aériennes. ↩︎
  16. théorie (Antiquité grecque) : procession, députation solennelle et sacrée, composée de théores et présidée par un archithéore. « encore des montagnes – merveilles azurescentes, toujours inaccessibles ou bien se morcelant en théories interminables de collines désertiques ;  » (Lolita, 1955, Vladimir Nabokov). ↩︎
  17. empreinte : en éthologie et en psychologie, marque laissée dans la mémoire d’un animal ou d’une personne par la première chose venue (personne, animal, voire objet) qui sera ensuite toujours associée à un comportement instinctif. ↩︎
  18. Friend zone : zone psychologique limitée aux relations amicales. ↩︎
  19. group by : la commande GROUP BY est utilisée en SQL (un langage d’extraction de données), pour segmenter des résultats selon les valeurs prises par un critère commun et appliquer à chacun des segments une fonction de total ou de moyenne. ↩︎
  20. chameaux : appellation familière désignant les variations d’une courbe de valeurs. ↩︎
  21. Mademoiselle ne chante pas le blues : référence à la chanson de Patricia Kaas, Mademoiselle chante le blues. ↩︎
  22. Le bal du diable : roman érotico-fantastique de Dominique ANTARES (1998). ↩︎
  23. amarrée au cœur de Paris : goûtez la polysémie. ↩︎
  24. polyuréthane : dans les années 1970, l’uréthane a révolutionné les sports à roulettes. Les polyuréthanes peuvent être fabriqués avec une grande variété de textures et de duretés en variant les monomères utilisés et en ajoutant d’autres substances. Ils sont utilisés pour les colles, peintures, élastomères (« caoutchoucs »), mousses, fibres. ↩︎
  25. félinité : vous confondez avec féminité. ↩︎
  26. Mariée : voir Black Mamba. ↩︎
  27. flappers : aux États-Unis, nom donné aux jeunes femmes garçonnes du début des années 1920, portant une robe au-dessus du genou et les cheveux courts, coupés au carré. ↩︎
  28. Black Mamba : nom de code de Beatrix Kiddo, surnommée la Mariée (The Bride), le personnage principal des films Kill Bill.
    C’est aussi le Mamba noir, un serpent très venimeux qui peut dépasser les 4 mètres et qui doit son nom à la coloration noire de l’intérieur de sa bouche. La couleur de sa peau parfois noire varie du jaune-vert au gris métallique. Doté d’une grande agilité, c’est le serpent le plus rapide connu. ↩︎
  29. tellurique : relatif à la terre ou au sol. Le CEO est assimilé à Hadès, roi du monde souterrain et des morts et dieu de la richesse cachée de la terre. Ses attributs sont la kunée, la corne d’abondance, le sceptre à deux fourches et le char tiré par deux créatures mi-hommes, mi-chevaux (les centaures). L’animal qu’on lui associe est le serpent (voir Black Mamba). Hadès enleva Perséphone pour en faire sa femme (voir Perséphone). ↩︎
  30. lave mouvante portée à l’incandescence : voir tellurique. ↩︎
  31. aux perroquets en balsa : le perroquet symbolise l’être qui reproduit les schémas psycho-sociaux. Le balsa est un bois extrêmement léger et cassant (maquettes, effets spéciaux, composites sandwich des pales d’éoliennes, etc.). C’est une référence au livre de Kundera, L’insoutenable légèreté de l’être (1982). Dans ce roman, Sabina poursuit une quête de la légèreté et de la liberté sentimentale et idéologique. Plus ambigu, Tomas est pris dans une dualité constante : il évite les liaisons durables pour saisir l’immensité du monde mais dans son cœur il n’y a de place que pour Tereza qui, avec Franz, incarne la pesanteur qui fait s’attacher à des êtres et des principes. ↩︎
  32. Jeu de mots avec l’arrêt et la raie. ↩︎
  33. qui opine de la cloche : l’expression originale est opiner du bonnet. La cloche fait référence au chapeau cloche que porte Fabien. ↩︎
  34. Baiser de fortune
    Dessus la cendre des prunes
    La lune se pose
    Haïku d’Harakiri Xiaomi ↩︎
  35. porte 2 : je ne vous fais pas un dessin. ↩︎
  36. durée moyenne de conversation : abrégée DMC dans les centres d’appels. ↩︎
  37. sacs en toile de jute : pour étouffer le bruit des pas de sa monture. ↩︎
  38. à mille milles de toute terre habitée : Le Petit Prince (1943), d’Antoine de Saint-Exupéry. ↩︎
  39. Référence aux trente glorieuses. ↩︎
  40. Eludie : jeu de mots avec élue. ↩︎
  41. Et le titre du conte trouva enfin sa justification. ↩︎




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