7 rue des Cévennes


Vous sortez faire une course. Vous utilisez une application de votre smartphone pour enregistrer oralement vos impressions, vos découvertes, vos rencontres. Vous prenez quelques photos en faisant attention de ne pas vous faire écraser. Soudain, votre sortie prend un tout autre tour. Vous êtes attentif à une foule de choses à côté desquelles vous passez habituellement sans les voir. L’enquête peut commencer.

Plus tard, vous transcrivez votre moisson au moyen d’un traitement de texte et organisez tout ça. Vous créez des raccourcis, des associations d’idées, vous culbutez, complétez, désossez, floutez, précisez, amplifiez, amalgamez, faites des recherches. Vous avez même prévu de retourner sur les lieux du crime pour vérifier deux ou trois choses.

Est-ce que vous ne seriez pas par hasard en train de commencer un journal intime ? L’horreur vous gagne. Non, il s’agit seulement d’une chronique. Rien de grave.

Vous n’avez jamais tenu de journal intime. Passée la honte, vous décidez d’en faire l’expérience, ne serait-ce qu’une journée. Un journal intime éphémère, en somme. Entre chronique et prise de note, le journal intime n’accepte aucune règle. Ou peut-être chaque journal intime a-t-il ses propres règles. Ça vous arrange. Pas de théorie à assimiler. Seulement cette question récurrente du pourquoi écrire. L’exercice du journal intime pourrait-il vous apporter des fragments de réponse ? Peut-être bien que oui. Vous vous rassurez en vous disant que vous pourrez toujours masquer l’intime en revenant sur votre texte et vous vous lancez dans l’aventure.

Ci-dessous, une tentative récente, dans cet esprit. J’ai mis en gras les passages ajoutés quelques jours après la transcription.

7 rue des Cévennes

Ce matin, dans la cour, le roucoulement des pigeons s’est ralenti, assourdi même. On dirait qu’ils ronflent. Je prends ma casquette et je sors.

La pharmacie ouvrira ses portes dans une demi-heure. Leur site internet n’est pas à jour. En attendant, je marche jusqu’au point relais où deux livres d’occasion m’attendent.

Le magasin ouvrira ses portes dans une demi-heure. Je retourne à la pharmacie. J’arrive juste au moment où le rideau de fer s’enroule avec des craquements de rachis de bébés surmulots.

Une pharmacienne compétente mesure à plusieurs hauteurs la circonférence de mon membre inférieur droit. Les bas de contention seront livrés demain. On m’appellera. Je repars en direction du point relais.

La rue Saint-Charles n’est pas déserte. Plusieurs couples promènent leur chien. Ce sont de vrais chiens. À 9 heures, la température extérieure est déjà de 29° centigrades et déjà une hallucination passe une tête. Une grosse poule rouge monte la garde sur un balcon. À l’angle de la rue, la présence d’un magasin Picard me tranquillise immédiatement.

Poule de garde

LiDL recrute des équipiers polyvalents : comme Lorie, rejoignez-nous. En 2022 mon salaire dépasse les 2000 € affirme la femme à la peau magnifique, souriant avec ses dents de devant pour témoigner que chez LiDL tout le monde peut être acteur de l’économie de marché.

Une dame ménopausée en robe à motifs lie de vin tourne autour de sa voiture en s’épongeant le cou avec un kleenex. De l’autre côté du mur, il y a le cimetière de Grenelle où un ange emporte pour l’éternité une enfant de la famille Schmid. La culpabilité et le chagrin des parents sont proportionnels à la taille de l’ange. Le ciel est bleu comme un jus d’orange de Curaçao, E133, celui qui colore les urines. Sur un parking, trois trottinettes ne doutent de rien.

Le n° 1 de l’épilation totale est fermé. La devanture mériterait un bon coup de karcher. Un postier contrarié de 28 ans pousse un petit caddy avec embonpoint. Sur l’avenue, les robiniers sont tout verts, il neige des vraies fleurs de faux acacia.

A ce stade du récit, l’on sent bien que le moral de l’auteur est défaillant. Mais il faut laisser le lecteur en dehors de tout ça.

Le gérant de la petite surface m’explique que son PDM n’est pas disponible car un livreur est en train de décharger des colis. J’acquiesce d’un air entendu comme si j’avais moi-même un PDM au fond de mon sac. En attendant que la situation évolue, je fais des recherches sur Google. Product Data Management. Je ne vois pas autre chose. Certainement pas Pays De Merde. Produits De la Mer, non plus. J’imagine le gérant recherchant mes colis avec une pince en forme de coquille de moule géante (genre anodonte chinoise) tout en se dandinant sur un rythme de Kery James.

Je ne m’aventure pas plus loin, estimant que ça ne va me conduire nulle part. Alix Mathurin a tout de même américanisé son nom, de ouf. Mais on ne va pas chipoter, les livres sont en très bon état.

Et maintenant, que vais-je faire ? Grand, taille fine à la fraise, longue chevelure épaisse et lisse qui bouge comme du sable, un être surnaturel tout droit sorti du roman de l’été croise mon itinéraire bis. Sous la mousseline double gaze, son cul tremble avec un acharnement qui ne devrait pas tarder à donner naissance à une nouvelle église.

Selon ARIHM Conseil, les causes de discrimination à l’embauche sont l’âge, la religion, le handicap, le genre, la grossesse, la couleur de peau. Il n’est pas interdit de cumuler. Malgré le réchauffement climatique, la pêche au moule a encore de beaux jours devant elle

La pêche au moule

Rue des Cévennes, des gens sortent d’un centre d’accueil par intermittence. L’un d’eux est équipé pour une longue journée de canicule à travers la capitale : short capri bleu marine moucheté à l’aspect velouteux, t-shirt de coton uni assorti, tendu par une bedaine qu’il surveille comme le lait sur le feu – même si le micro-onde a changé la donne.

On dirait qu’il souffre d’une paralysie des muscles de la nuque, ou d’un syndrome psychomoteur aiguë, comme s’il avait renoncé à porter un regard sur les êtres et sur les choses. Peut-être qu’il a honte de se rendre à Paris Plages, ou qu’il a peur de marcher sur une crotte de chien. Chapeau gris clair, sac à dos bleu pétant, le masque en mentonnière.

En route pour Paris Plages

Ses mollets glabres sont blancs comme de la craie. D’un pas mécanique, il va nu-pieds dans des chaussures bateau, les cheveux blonds coupés courts, la quarantaine et la nuque rouges, un clop coincé entre deux doigts au bout de son bras gauche. Un bracelet de fibre pendouille à son poignet. Je le laisse s’éloigner avec son terrible secret.

Des roseaux apportent leur fraîcheur à une courette encombrée de meubles de jardin, de cagettes et de plantes en pot. Je décide d’aller voir ce qu’il y a au 7 rue des Cévennes. Seven signifie sept en anglais. Et Cévennes signifie sept veines en cévenol, ce territoire étant traversé par sept cours d’eau.

Curieusement, le premier numéro impair est le 21, un immeuble des années quatre-vingts à l’angle de la rue Balard. Il y a bien ce numéro onze inscrit en chiffres gris sur le mur du bâtiment suivant, mais il n’y a là aucune trace d’entrée (celle-ci se trouve rue Balard).

Pour le 7, Google Maps indique un buisson de chèvrefeuille. Je ne sais pas qui peut vivre dans ce buisson à part quelques parasites aux nez paresseux, genre Otiorhynchus. Le dernier édifice à côtoyer la rue des Cévennes côté impair est la tour Orphée, vue imprenable sur la Seine, son entrée se trouve au 79 Quai André Citroën. Je continue ma route sans oser me retourner.

La rue des Cévennes oblique alors à gauche, parallèlement à une voie qui s’engage dans un tunnel en contrebas. Une végétation composée d’herbacées et d’arbustes borde la rue sur une vingtaine de mètres, jusqu’à une place de la Laïcité aménagée pour pratiquer le skateboard.

Ses cheveux frisés attachés en queue de cheval donnent un air extrêmement sympathique à un jeune homme assis torse nu sur une estrade ombragée. Son attitude friend zone ne semble pas décourager sa camarade de jeu qui pose des questions qui s’intéressent à lui. Elle a mis plusieurs dents sur le tapi.

Sous une sorte de préau, dans une alcôve, quelques livres et des BD qui sentent la mérule sont à disposition du public. Je parcours une épopée érotico-mythologique aux images et au scénario rebondissants, Epoxy. Après un naufrage en Méditerranée, une jeune femme se retrouve embarquée complètement nue dans le monde parallèle où vivent les divinités de la Grèce antique. C’est l’occasion de réviser ses classiques. Cette BD dessinée par Paul Cuvelier (c’est aussi le nom de mon médecin traitant) et mise en scène par Jean Van Hamme – couleurs de Bertrand Denoulet pour cette réédition de 2003 – est parue en 1968. C’est l’unique œuvre érotique de l’excellent dessinateur Paul Cuvelier (qui n’est jamais parvenu à vivre de sa peinture) et la première signature de Jean Van Hamme – la publicité de cet agrégé d’économie politique auteur de Thorgal, XIII et Largo Winch n’est plus à faire (mais je la fais quand même).

Les éditeurs disent qu’il faut une scène de sexe toutes les dix pages. Il va maintenant falloir patienter jusqu’à la fin de cette chronique. Je n’ai pas trouvé la confirmation de cette règle sur internet, j’ai dû lire ça dans un roman de Houellebecq. Par contre, l’article suivant a été proposé par Google : « À partir de quand faut-il considérer que l’on est addict au sexe? ». Je n’ai pas pris le temps de l’ouvrir mais je propose une réponse : à partir de quatre-vingt-dix ans, pour les plus chanceux. J’imagine qu’il existe un numéro vert.

De l’autre côté de la rue des Cévennes, sur la gauche, face à la place de la Laïcité, au pied des bâtiments Lagardère Media News sis 2 rue des Cévennes, se trouve un espace vert presque carré que ses hauts murs dissimulent à la vue des passants (je n’ai à proprement parler encore croisé personne). Le 9 rue Cauchy donne accès à des bâtiments techniques de ce bien nommé Jardin des Cévennes, mais l’entrée du public se fait quelques mètres plus loin par une porte sans numéro qui pourrait être le 7. Sur le site Internet de Paris, le jardin a pour adresse le 3 rue Cauchy qui de toute évidence n’existe pas. Décidément, on fait tout dans ce quartier pour évincer les 7.

Le Jardin des Cévennes – rue Cauchy

Au fond de ce jardin, un cabanon abrite le matériel d’une vieille sorcière qui fait semblant d’arroser les plants d’une sorte de potager ornementale, en attendant que se présente une proie facile en quête de repos éternel. Dans leurs robes de tulle, des grappes de raisin tentatrices courent le long du grillage. La présence d’érables, et de cerisiers à fleurs parmi les pins me met la puce à l’oreille : nous ne sommes pas dans les Cévennes. Cette femme cache quelque chose. Je prends la fuite. À la sortie, en consultant la fiche technique de l’espace vert, j’apprends que celui-ci ne dispose d’aucun défibrillateur. J’aurais dû m’en douter.

Passée la place de la Laïcité et la rue Cauchy, la voie longe le parc Citroën sous un autre nom, rue de la Montagne de l’Espérou. C’est encore les Cévennes mais il faut se faire à l’idée que le 7 rue des Cévennes n’existe pas. C’est un peu dommage mais on ne va pas en faire toute une histoire. C’est aussi l’avis de la Schtroumpfette du 14 juillet. Je fais un détour par le parc puis rentre par les quais.

La schtroumpfette du 14 juillet

Il y a des feuilles en forme d’urinoir et des roses en papier toilette tout droit sorties d’un programme de lavage indélicat. Leur appareil de pourpre déclos a perdu, probablement cette vesprée, les plis qui faisaient son charme discret et ce teint pareil à celui du soleil qui se vautre.

Je traverse un jardin de glycines possessives, passe sous l’arbre à gousses et regarde le soleil à travers les bambous. Dans le ciel bleu, le ballon captif cherche à m’impressionner. Les graviers du clos de mnémosyne font remonter en moi quelques souvenirs.

Les graviers du clos de mnémosyne

Attention, la courte animation ci-après va révéler (sinon réveiller) votre nature paléolithique profonde : cadrez la vidéo et regardez-la, maintenant.

Si vous avez plutôt regardé le haut de l’écran et avez été sensible au clignotement apaisant de la lumière entre les tiges, vous êtes un cueilleur.

Si vous avez plutôt regardé le bas de l’écran et avez cru distinguer des ombres furtives derrière le rideau végétal, vous êtes un chasseur.

Je ne juge pas, je vous informe.

Sur la seine, une péniche chargée jusqu’aux molaires flotte comme un miracle. Je m’attarde un instant devant un tas de terre qui dépasse l’imagination.

La trainée rouge du silo de la cimenterie Lafarge Mirabeau, me fait penser au corps perdu d’Honoré Gabriel Riqueti et au sang de la révolution qui flotte sur nos drapeaux.

Sur le parapet qui borde la rampe d’accès à la station Javel, un colombin de passage à Paris me demande de le prendre en photo. Il est un peu palot. Les pigeons sont de grands voyageurs. Je ne comprends pas tout ce qu’il me dit.

En vérifiant la netteté de ma prise de vue, je m’aperçois que je viens de photographier un ange. J’ai gagné ma journée.

Colombin à tête d’ange
Pierrot le colombin de Colombine

Sous le pont Mirabeau, les amours décolorés d’Apollinaire ont perdu eux aussi leur éclat.

Moralité : cette rudesse est vaine.


NOTES :



Alix Mathurin, alias Kery James, est le rappeur français d’origine haïtienne qui a écrit Pays de Merde, une chanson à la gloire des États-Unis, en réponse à la question de Donald Trump : « Why do all these people from shithole countries come here ? » (« Pourquoi est-ce que toutes ces personnes, issues de pays de merde, viennent ici ? »). Pour être précis, shithole signifie proprement « trou à merde » (shit « merde », hole « trou »). Donc la traduction « pays de merde », qui signifie « pays où tout va mal » (sans forcément exprimer de mépris pour les habitants concernés), est à mon sens moins forte que « shithole countries », car elle ne traduit pas l’idée de trou (que l’on retrouve atténuée dans l’expression « trou du cul du monde »). Quoique moins officielle, la traduction suivante me semble plus fidèle à la violence du propos : « Pourquoi tous ces étrangers sortent-ils de leur trou à merde pour venir ici ? »




Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau.

Son blason est partagé entre la rose et la fleur de lys : d’azur, à la bande d’or, accompagnée en chef d’une demi fleur de lys du même (donc or), défaillante à dextre et florencée d’argent (blanc), et en pointe de trois roses du dernier (donc blanc). De même, la double casquette de Mirabeau est révélée en novembre 1792, moins d’un an après sa panthéonisation FIFO. L’Assemblée nationale avait pourtant voté pour ses beaux yeux la transformation de l’église Sainte-Geneviève en Panthéon, deux jours après sa mort.

L’armoire de fer de Louis XVI révèle que Mirabeau avait des contacts avec le roi et sa cour. Espérant devenir ministre de la monarchie constitutionnelle, le joueur invétéré, rémunéré en livres d’or par heure, lâchait des infos et conseillait le roi d’accepter la limitation de ses pouvoirs voulue par l’Assemblée. Deux ans après ces révélations, sa dépouille est dépanthéonisée pour être remplacée par celle de Marat, et transportée au grand cimetière de Saint-Étienne-du-Mont. Quatre ans plus tard, sa sœur fait procéder à son exhumation pour qu’il soit transféré dans une fosse commune du cimetière de Clamart. Les recherches entreprises en 1889 pour le centenaire de la Révolution ne permettront pas de retrouver son corps.

Honoré n’était pas en très bon terme avec sa famille. Ce n’était pas pire que son copain de Sade mais tout de même. Il faut dire qu’il n’était pas parti du bon pied. Il est né hydrocéphale avec un pied tordu, deux grandes dents et la langue enchaînée par le filet. Avant de présenter l’enfant à son père, la nourrice, une certaine Rose-Marie, le prévient : « Ne vous effrayez pas ». Et l’accoucheur d’ajouter : « L’Orateur du peuple aura beaucoup de peine à s’exprimer ». À l’âge de trois ans, sa bonne fée passe prendre de ses nouvelles et il est défiguré par une petite vérole. Son père écrit à son frère, le bailli de Mirabeau : « Ton neveu est laid comme le fils de Satan ». Selon Victor Hugo, il est d’une « laideur grandiose et fulgurante ».

Réalisé avec Photoshop

Sa grosse tête de criquet fait pourtant honneur au nom de la famille Riqueti (francisé en Riquet, un des noms vulgaires du grillon). Littré, dans son article « Riquet à la Houppe », précise : « on dit qu’en normand, riquet veut dire contrefait, bossu ». L’on sait que la laideur de Riquet à la Houppe n’a d’égale que la grandeur de son âme. Le radical Ric est présent par ailleurs dans de nombreuses références au diable. On pense à la BD Ric Hochet – Les Compagnons du diable. Mais aussi à ric service la société de manutention levage qui propose des chariots et des diables à la location, au département Ressources Informatiques et Communications de la ZI de la Pointe du Diable (Plouzané), au Référendum d’Initiative Citoyenne des diables jaunes, au Réseau d’Imagerie Cellulaire de Saclay, commune appartenant à la cinquième circonscription de l’Essonne, représentée par le député gothique Cédric Villani… La liste est longue.

En 1940, Walt Disney rendra sa grandeur au minuscule Jiminy Cricket en lui faisant représenter la bonne conscience de Pinocchio.

Un peu comme Pinocchio, Mirabeau commence par contracter des dettes de jeu et fuir avec une femme mariée… Plusieurs fois emprisonné par son père, ses séjours en détention donnent naissance à une littérature érotique de premier ordre. L’animal politique fait son éducation. Mais Mirabeau, en provençal Mirabèu, vient de mirar « voir » et bèu « beau ». Mirabeau sera le visionnaire que l’on sait, contre le despotisme et pour l’abolition de l’esclavage.

Retour à Honoré Gabriel Riqueti




décolorés à l’eau de Javel, bien sûr.




cette rudesse est vaine : sept rue des Cévennes.




la pêche au moule : recrutement imposant les critères d’un moule. Jeu de mots avec pêche aux moules.




la Schtroumpfette du 14 juillet : jeu de mots avec fête du 14 juillet.




soleil qui se vautre : soleil qui se couche. Jeu de mots avec le « vôtre » de « au vôtre pareil » (Pierre de Ronsard).




Rose-Marie : référence à Rosemary’s Baby, le film d’horreur fantastique dramatique américain réalisé par Roman Polanski, sorti en 1968 (adaptation du roman Un bébé pour Rosemary d’Ira Levin, paru en 1967). Le film suit dans Manhattan (l’île aux nombreuses collines), une jeune femme enceinte qui suspecte que ses voisins, plus âgés, n’utilisent son bébé dans un culte satanique. Le film traite de la paranoïa, de la libération de la femme, du catholicisme, du véganisme et des sciences occultes.




mérule : la ou le mérule, appelé aussi « champignon des maisons » (du grec merizo « partager, fragmenter ») est un nom vernaculaire ambigu qui désigne plusieurs espèces de champignons lignivores (le papier est fabriqué à partir du bois).




lignivore : qui se nourrit de bois (du latin lignum « bois »). C’est un synonyme de xylophage. Selon que vous êtes latiniste ou helléniste, vous direz respectivement lignivore et carnivore, ou xylophage et sarcophage. Plus sérieusement, dans le cadre professionnel, vous entendrez souvent dire « les bandelettes de la momie du sarcophage numéro 69 sont bouffées par les champignons lignivores ».




FIFO : first in first out (premier entré premier sorti). Mirabeau est en effet le premier à entrer au Panthéon et le premier à en sortir.




Marat : lorsqu’il était médecin de l’écurie et des pages du comte d’Artois, frère du roi, Marat essaya vainement de faire reconnaître sa fausse noblesse espagnole et enregistrer un blason que l’on retrouve sur sa correspondance entre 1778 et 1789 : « Au 1er de [émail inconnu] à un demi-aigle de [émail inconnu] au vol abaissé mouvant du parti ; au 2e tranché en chef de [émail inconnu], à la bande ou demi-chevron de [émail inconnu], et en pointe de pourpre. » Selon Claudius Roux : « À cette époque, il se faisait appeler M. de Marat, essayait vainement de se faire anoblir, ayant par avance fait graver dans ce but un cachet avec des armoiries initiées de Genève et de Neuchâtel, surmontées d’une couronne de comte, cachet dont j’ai pu retrouver une empreinte intacte dans les archives de l’Académie des Sciences de Stockholm, et dont il existe une autre empreinte, brisée, dans les archives de l’Académie de Lyon. »

Le Physicien et médecin raté, jaloux d’Isaac Newton (dont je vous recommande la biographie, ce n’était pas un révolutionnaire mais il fit exécuter quelques personnes) fera payer très cher à la noblesse cette déconvenue avant que Marie-Anne Charlotte de Corday d’Armont, issue de la noblesse caennaise et arrière-arrière-arrière-petite-fille de Pierre Corneille (le dramaturge aurait sans doute été fier de sa descendance), ait le courage d’assassiner ce grand boucher devant l’éternel. Elle parvient à l’approcher, après plusieurs tentatives, en lui faisant parvenir une lettre qu’elle a écrite donnant des informations sur un prétendu complot.
Des migraines et une dermatite séborrhéique à leur acmés (ne pas confondre avec l’acné, féminin également) causaient de terribles démangeaisons et des ulcères douloureux à l’animal politique sanguinaire obligé de prendre continuellement des bains curatifs au soufre dans sa baignoire sabot en cuivre équipée d’un écritoire, ainsi qu’à envelopper sa tête d’un mouchoir trempé de vinaigre (cf. le tableau de David). Je suppose que la petite Charlotte avait dû s’entrainer sur quelque carcasse de mouton dans les cuisines de l’abbaye aux Dames (où elle avait échoué après que l’entrée à Saint-Cyr lui fut refusée) : la lame traversa le poumon droit, l’aorte et le cœur.

« J’ai tué un homme pour en sauver 100 000 » a-t-elle dit sur l’échafaud, en écho à l’exclamation de Robespierre juste avant l’exécution de Louis XVI (« Louis doit mourir parce qu’il faut que la patrie vive »).

Marat est panthéonisé en novembre 1793 et entre au Panthéon le 21 septembre 1794 dans un état de putréfaction plus qu’avancé. Le 8 février 1795, un décret le dépanthéonise. La fortune avait cessé de sourire aux Jacobins, qui commencèrent à imploser en 1794 : après y avoir envoyé Hébert (trop radical) et Georges Danton (trop tolérant), Robespierre et son acolyte Saint Just les suivirent sur l’échafaud. En 1795, la Terreur prend fin et avec elle la réputation de Marat qui n’est plus celle d’un Dieu de l’Olympe.

Le corps de Marat a disparu mais la célèbre baignoire se trouve toujours au Musée Grévin qui l’avait acheté 5000 francs au curé qui l’avait récupérée.

En relisant cet article quelques deux mois plus tard, je réalise que Charlotte porte une charlotte, cette petite coiffe jetable utilisée par le personnel hospitalier (pour éviter qu’un cheveux ne tombe dans une plaie ouverte) et les ouvriers de l’industrie agro-alimentaire (pour éviter qu’un cheveux ne tombe dans la barquette de velouté de champignons de Paris au paprika), ou réutilisable et imperméable (les femmes des années 70 en portaient quand elles prenaient leur douche car les sèche-cheveux étaient encore hors de prix).

Combien voyez-vous de charlottes ?

Mon sang ne fait qu’un tour, je me jette sur le Dictionnaire historique de la langue française : et si Charlotte de Corday d’Armont avait donné son nom à la coiffe ?

Ce bonnet d’intérieur en batiste ou en mousseline, avec une bordure froncée, servait à cacher les cheveux de nombreuses femmes du 18e siècle, afin d’indiquer leur respectabilité (une sorte de préservatif, en somme).

Bingo, c’est bien Charlotte de Corday d’Armont, experte en chirurgie cardio-vasculaire, qui a donné son nom à la coiffe en 1905 ! Une charlotte vaut bien un bonnet phrygien.

Par contre, sans vouloir remettre en question le sérieux de ce dictionnaire Le Robert, je constate que le mot charlotte est attesté en anglais dès 1796. Ce serait en l’honneur de Sophie-Charlotte de Mecklembourg-Strelitz (1744-1818), dite la reine Charlotte, qu’aurait été créée la charlotte, un entremets fait de marmelade de pomme entourée de tranches de pain grillé et frit.

Je n’en mettrait pas ma tête à couper mais il me semble que Marat trempait des tranches de pain dans du vinaigre et se les appliquait sur le front pour calmer les migraines qui mettaient son cerveau en compote.

George III (premier roi du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande) et la reine Charlotte (surtout elle) eurent quinze enfants (neuf fils et six filles), dont treize atteignirent l’âge adulte (Wikipédia nous dit également que, contrairement à ses prédécesseurs et à ses fils, George III n’eut pas de liaisons extraconjugales ; ce n’est pas fondamental pour notre exposé mais l’information mérite d’être rapportée).

Vous comprenez maintenant pourquoi de nombreuses recettes préconisent d’utiliser quinze tranches de pain pour réaliser une charlotte (« c’est vrai papa ? »).

Quel rapport avec la coiffe de Charlotte Corday ? Jugez-en !

Visiblement, un peu de cannabis a été ajouté dans la compote de pomme.

La coiffe aurait pu hériter du nom de l’entremets. Sinon, comment s’appelait cette coiffe avant 1905, à l’époque où Charlotte la portait ?

La laitière (1660) – Johannes Vermeer

Un bonnet, probablement. Un autre nom de la charlotte est le bonnet des laitières dont elle dérive, semble-t-il.

Un cheveux dans le lait et le voilà qui tourne !

« Tu me fais tourner la tête
Mon manège à moi c’est toi
 »

Manège éternel, comme les neiges du Kilimandjaro (du swahili Kilima « colline » et Njaro « démon du froid »).

Pas d’inquiétude, si vous voulez aller faire un tour dans les collines, la charlotte protège du soleil et des courants d’air.

Mais tout ça ne vaut pas ce clair de lune (Maubeuge est à 8 km de la Belgique), incroyable charlotte renversée qui enveloppe parfaitement les cheveux, autoportrait de la renversante artiste photographe belge, Charlotte Abramow (courrez découvrir son site).

Mystiques du détail et taraudeurs du quotidien, les belges sont imprégnés de culture surréaliste.

EQUILIBRE INSTABLE (2014) – Charlotte Abramow



émail inconnu : rien à voir avec les spam. L’émail désigne la couleur en héraldique (http://dardel.info/heraldique/Heraldique.html/). Les couleurs sont toujours parfaitement unies et sans nuances de teinte. Il y a toujours deux métaux (or et argent) mais le nombre d’émaux varie selon les époques : pour Ménestrier, il y en a quatre (gueules, azur, sable et sinople) ; pour Jean-Baptiste Philipoteau du Chesne (1682-1755), il y en a cinq, il ajoute le pourpre. L’orange est encore postérieur et surtout utilisé en Grande-Bretagne (l’était-il déjà en 1778 ?).

Récap des couleurs : or = jaune ; argent = blanc ; Gueules = rouge ; Azur = bleu ; Sable = noir ; Sinople = vert ; Pourpre = violet ; Orange = orange.

Reste à savoir si dans la citation, l’expression « émail inconnu » désigne bien un émail et non un métal (selon moi, émail est utilisé de façon générique).

Après avoir cherché en vain sur internet, j’ai tenté de reconstituer le blason de Marat.

« Au 1er de [émail inconnu] à un demi-aigle de [émail inconnu] au vol abaissé mouvant du parti ; au 2e tranché en chef de [émail inconnu], à la bande ou demi-chevron de [émail inconnu], et en pointe de pourpre. »

Le blason est en deux parties (Au 1… ; au 2…). Ces deux parties résultent d’une division verticale par le milieu car la 1ère partie comporte un demi-aigle.

Comme Marat voulait faire valider une fausse noblesse, je fais l’hypothèse qu’il ne voulait pas faire le malin et avait choisi des couleurs standards. La majorité des aigles (figure très répandue) sont noirs sur fond jaune (36%, Cas A) ou noirs sur fond blanc (25%, Cas B). Le demi-aigle a l’aile déployée (on parle de vol), sa division coïncide avec celle du blason (mouvant du parti), il est positionné plus bas que la médiane horizontale du blason (vol abaissé).

La 2e partie (ou moitié) du blason est coupée en deux par une bande oblique qui part en haut à gauche et descend en bas à droite car elle est la 2e branche d’un chevron (un chevron a la forme d’un accent circonflexe). « tranché en chef » signifie peut-être que la bande part du haut du blason (le chef). La pointe est violette (pourpre), c’est la seule couleur qu’on connaisse. On aurait donc, du violet à gauche de la bande. Ce qui me dérange, car on outrepasse un peu la pointe…

Le violet est associé le plus souvent soit au blanc, soit au jaune (couleur complémentaire). Et on le voit parfois côtoyer le vert ou le noir. Donc la pointe violette est compatible avec nos deux versions hypothétiques de la 1ère partie (ou moitié) du blason, jaune et noir (Cas A), ou blanche et noire (Cas B), cf. l’image ci-dessus.

Nous avons donc deux possibilités (Cas A et B de l’image ci-dessus). Continuons.

Concernant la couleur de la bande, on peut dans tous les cas exclure le violet (la bande est accolée à la pointe violette), l’orange (très rare), le noir (interférence avec l’aigle), le bleu et le rouge qui sont à mon sens des couleurs trop proches du violet (je n’ai jamais rencontré de tels assortiments).

Donc, si la 1ère moitié du blason est jaune (Cas A), il reste, pour la bande, le blanc (Cas 1) ou le vert (Cas 2) car le jaune interfèrerait avec la 1ère moitié jaune du blason). Et si la 1ère partie est blanche (Cas B), il reste, pour la bande, le jaune (Cas 3) ou le vert (Cas 4) car le blanc interfèrerait avec la 1ère moitié blanche du blason).

Concernant la couleur de la tête pour chacun des cas 1 à 4 de l’image ci-dessus :

  • Cas 1 (bande blanche) : la tête ne peut être que noire car jaune et violet étant des couleurs complémentaires, il n’y a pas de 3e couleur éligible à mon sens.
  • Cas 2 (jaune et vert) : la tête ne peut être qu’orange car cette couleur complète le pôle « vert, jaune, orange » dans l’opposition au violet (cf. la roue chromatique en fin de note). Mais nous avons vu que nous pouvons éliminer l’orange qui est extrêmement atypique. Marat n’aurait pas pris ce risque (même si cette couleur est propre aux blasons anglais et que Marat a obtenu ses diplômes en Angleterre).
  • Cas 3 (bande jaune) : la tête ne peut être que noire pour les mêmes raisons que celles du Cas 1.
  • Cas 4 (blanc et vert) : la tête ne peut être qu’orange car cette couleur est complémentaire dans le trio « vert, violet, orange » (cf. la roue chromatique en fin de note). Nous avons vu que nous pouvons éliminer l’orange.

Il ne reste donc plus que les cas 1 et 3.

Le problème du cas 1 est que la bande blanche crée une opposition Violet/ noir trop directe et peu harmonieuse en matière de teinte : les deux couleurs sont sombres et froides et communiquent mal.

Reste le cas 3 qui me semble acceptable -quoique macabre : la bande jaune s’harmonise des deux côtés (complémentaire du violet d’un côté et opposition lumière/obscurité de l’autre). D’autre part, le demi-aigle surbaissé et le triangle noir se répondent dans une quasi-symétrie centrale. Symétrie qui n’est pas sans évoquer celle du blason improbable de Newton (anobli en 1705 par la reine Anne, première reine de Grande-Bretagne).

Voici encore un mystère de l’histoire élucidé (et je ne suis pas peu fier d’y avoir contribué).

Mais c’était sans tenir compte de l’information de première main communiquée un peu plus loin par Claudius Roux : « À cette époque, il se faisait appeler M. de Marat, essayait vainement de se faire anoblir, ayant par avance fait graver dans ce but un cachet avec des armoiries initiées de Genève et de Neuchâtel… »

Armoiries genevoises actuelles

Une enluminure de 1451 représentant un ange offrant les armoiries de Genève à saint Pierre et saint Paul représente des armoiries identiques aux armoiries genevoises actuelles. Les couleurs du canton ne furent pas toujours le jaune et le rouge. Avant le XIIe siècle, elles étaient noires et grises, le gris fut changé au XIIe siècle pour du violet (la seule couleur connue du blason de Marat), parfois accompagné du rouge. Ce n’est qu’en 1699 que le Conseil des Deux-Cents (notez la présence du tiret) décida d’harmoniser les couleurs cantonales avec celles de l’écu en optant pour du jaune et du rouge.

Blason de Neuchâtel (XIIe-XIVe)

Concernant Neuchâtel, on lit plusieurs choses :

  • Trois pals d’or et deux d’argent (blancs) chargés de chevrons de gueules (rouges) ».
  • De l’origine à 1153 : D’or à trois pals de gueules (rouges).
  • De 1153 à 1248 : D’or à trois pals d’argent (blancs).
  • XIIe-XIVe siècle (image précédente) : D’or, au pal de gueules (rouge), chargé de trois chevrons d’argent (blanc). Le drapeau correspondant resta en vigueur lors du passage de la Principauté de Neuchâtel en mains prussiennes en 1707.

Pour la 1ère partie, on peut donc partir sur un demi-aigle noir sur fond jaune (comme pour Genève). Attention à bien partager le croupion.

Pour la 2e partie, censée s’inspirer de Neuchâtel, selon les cas, il est question de pals d’argent (blanc) avec des chevrons rouges, ou de pal rouge avec des chevrons blancs. Nous avons donc les deux possibilités suivantes avec une préférence pour la seconde.

Désolé pour ce revirement. Le moment que vous venez de vivre est historique. L’histoire et la politique l’emportent sur la science des couleurs. N’ayant jamais rencontré de rouge accolé à du violet (mais je n’ai qu’une douzaine d’exemple avec du violet) et la tendance étant aux chevrons blancs, je propose de rester sur la seconde proposition (bande blanche) dont le caractère prémonitoire ne vous a pas échappé (le blason date de 1778).

La description complétée avec toutes ces hypothèses donne finalement ceci (bande blanche) :
« Au 1er d’or à un demi-aigle de sable au vol abaissé mouvant du parti ; au 2e tranché en chef de gueule, à la bande ou demi-chevron d’argent, et en pointe de pourpre. »

Selon moi, la solution que nous proposons (bande blanche) peut s’exprimer plus simplement de la sorte (il y a souvent plusieurs formulations possibles) :
« Parti: au 1 d’or à la demi-aigle de sable abaissée mouvant du parti, au 2 tranché de gueule et de pourpre, à la bande d’argent. »

« Parti: » signifie que le blason comporte deux parties situées de part et d’autre de son axe de symétrie vertical. Et par défaut les bandes descendent toujours de gauche à droite.

L’ambivalence du jaune, alliée à la mélancolie dépressive du violet, présage un destin violent (le rouge). La bande blanche rappelle celle, imbibée de vinaigre, dont Marat enveloppait son crâne migraineux.

Moralité : pour bien communiquer, soignez votre émail.

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La roue chromatique



émail : l’émail de vos dents (sourire) ou celui de votre blason. Jeu de mots avec email (variante orthographique de e-mail). Nota bene, l’anglais mail vient du français malle (70% du vocabulaire anglais serait d’origine française).




colombin : fiente de pigeon ou de volaille.




Elle a mis plusieurs dents sur le tapi : elle compte sur son sourire pour changer la donne.




Les graviers du clos de mnémosyne : le gravier est un puissant évocateur de souvenirs. Mnémosyne est la déesse de la mémoire. En regardant cette photo, on ne distingue tout d’abord qu’un premier plan de gravier avec des bandes bleu vert. Lorsque l’œil accommode, les bandes bleu vert semblent remonter à la surface comme des souvenirs et l’on distingue alors le détail des feuilles, le gravier passant au second plan.

Quand il se trouve dans les lentilles, le gravier peut déclencher une odeur d’essence de clou de girofle, dans la région préfrontale de votre cortex (l’odeur qui vous galvouille le cœur quand vous entrez dans le cabinet d’un dentiste).




sans oser me retourner : après avoir charmé de ses chants le royaume des morts tout entier, Orphée, fils d’un roi et d’une muse, obtient d’Hadès et de Perséphone (la voix des boîtes vocales, c’est elle) de repartir avec sa femme, la nymphe Eurydice, qui avait été foudroyée par une morsure de serpent le jour de ses noces alors qu’elle était poursuivie par Aristée (le fils d’Apollon, ce sauvageon). Mais Orphée, suivi d’Eurydice, n’attend pas d’avoir quitté les ténèbres pour se retourner. Et sa femme disparaît, perdue cette fois pour toujours.

Moralité, Eurydice est morte de n’avoir pas regardé où elle mettait les pieds et Orphée la perdit définitivement de n’avoir pas regardé où il mettait les pieds.

Si je n’ose pas me retourner, c’est pour laisser une chance au 7 rue des Cévennes, aussi mince soit-elle.



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