Ecrire pour les enfants


J’ai hésité à créer une rubrique particulière car mon expérience en la matière est limitée. J’ai faillis classer cette affaire dans la rubrique des contes. Mais nous sommes loin du conte. On sait pourtant qu’il existe des contes cruels, des contes érotiques et des marquis de Sade. La Barbe Bleue est un conte qui m’a longuement questionné lorsque j’étais petit. Tout ça pour dire qu’on ne sait jamais jusqu’où on peut aller avec les enfants. Tous ces loups, ogres et autres tueurs en séries violeurs de grands-mères sont tellement peu fréquentables…

Les stades de développement de l’enfant sont très précis et l’on peut imaginer qu’à un an près, l’âge puisse être un critère déterminant (sujet, vocabulaire, syntaxe…) Je n’ai même pas de bibliographie à vous proposer sur le sujet.

L’exercice est tentant cependant. Si vous contrôlez votre enthousiasme et que vous êtes doué de raison, vous pouvez tenter l’expérience. Au pire vous ne serez pas compris et vous pourrez tenter votre chance auprès d’une classe d’âge supérieure.

Se mettre (se remettre) dans la tête d’un enfant est un exercice salutaire et plaisant. Alors, pourquoi s’en priver ?

Voici une histoire que j’ai écrite lorsque ma fille est revenue de classe verte.

Le bracelet de la directrice a disparu

Le bracelet de la directrice du centre de vacance de Trébeurden avait disparu.

Jean-Paul, un animateur, avait aussitôt formé une équipe de détectives par classe : l’équipe qui retrouvera le bracelet sera récompensée. Y a-t-il des volontaires ?

C’est ainsi que je m’étais retrouvée responsable d’une petite équipe de bras cassés : Claire, Arnaud et Sébastien.

Nous sommes tout de suite allés questionner la directrice.

– S’il vous plaît Madame, quand avez-vous vu votre bracelet pour la dernière fois ?
– Mes pauvres enfants, c’est un bracelet auquel je tiens beaucoup ! Mon mari me l’a offert pour notre anniversaire de mariage.
– Depuis combien de temps êtes-vous mariée madame, demanda Claire ?

Arnaud donna discrètement un coup de pied à Claire : n’oublie pas qu’on a une enquête sur les bras, tu parleras chiffons une autre fois !

– À quel moment l’avez-vous retiré, rectifia Sébastien ?
– Je me souviens, je l’ai posé sur la cheminé lorsque j’ai préparé le feu pour la veillée d’hier soir, c’était aux environs de dix-neuf heures trente.
– Et à quelle heure vous êtes-vous rendu compte que vous n’aviez plus votre bracelet, demandai-je ?
– Hier soir, avant de m’endormir, mais j’ai trouvé ça normal car je le retire toujours pour dormir. J’ai cru que je l’avais déjà posé sur ma table de nuit.
– Vous êtes sûr qu’il n’est pas sur votre table de nuit, insista Arnaud ?

La directrice le foudroya du regard : vous me prenez sans doute pour une idiote ?

Les joues d’Arnaud devinrent écarlates. Je fus choquée par le changement de ton de la directrice. Je me dit que ça devait être normale pour une directrice.

– Merci beaucoup madame, me ressaisis-je, ces renseignements nous seront très utiles, nous allons tout faire pour retrouver votre bracelet. Au revoir Madame la directrice.
– Au revoir les enfants, dit-elle d’une voie tellement douce que j’en fus effrayée.

Nous avons fait le point dans la chambre des garçons.

– Nous voilà bien avancés, m’exclamai-je, n’importe qui a pu prendre le bracelet sur la poutre de la cheminée pendant la veillée !
– J’ai trouvé, s‘écria Claire, nous allons fouiller toutes les chambres !
– C’est tout ce que tu as trouvé, se moqua Sébastien ?
– Commence par celle de la directrice, conseilla Arnaud, ma mère cherche toujours les clés qui sont dans son sac à main et les lunettes qu’elle a sur le nez.
– Laissez tomber, dis-je, personne n’aura le courage d’entrer dans la chambre de la directrice et nous n’aurons jamais le temps de fouiller toutes les chambres. En plus nous allons nous faire plein d’ennemis. Essayons plutôt de trouver des suspects.
– Alice m’a dit qu’elle trouvait le bracelet de la directrice très joli et qu’elle aimerait bien avoir le même, se souvînt Claire.
– C’est intéressant ça, s’exclama Sébastien !
– Oui, qui a une autre idée, demandai-je ?
– Moi je pense que c’est Noé qui a fait le coup, affirma Arnaud !
– Je te défends d’accuser Noé, s’emporta Sébastien.
– Je sais que c’est ton meilleur ami mais je l’ai vu dans les toilettes des filles en train de faire un cadeau à Estelle !
– Estelle ! Mais c’est ma copine, hurla Sébastien !
– Que vas-tu faire Sébastien, demanda Claire toute excitée ?
– On va d’abord retrouver le bracelet, dis-je.
– Je vais tout de suite questionner Estelle, proposa Sébastien.
– Non pas toi, répondis-je, elle pourrait se douter de quelque chose, elle ne te dira jamais que ton meilleur ami lui a fait un cadeau ! Je vais m’en charger, Estelle est aussi mon amie ! Toi Claire, tu te charges de questionner Alice.
– Il vaut mieux que je demande à son frère, dit Arnaud, elle aussi pourrait se douter de quelque chose puisque c’est à Claire qu’elle en a parlé.
– Et nous, on fait quoi pendant ce temps, demanda Claire vexée ?
– Je vais jeter un œil dans la grande salle, dit Sébastien, on ne sait jamais.
– Bon, je vais dans le jardin cueillir un bouquet pour consoler la directrice, annonça Claire démotivée.
– Rendez-vous dans la chambre des filles dans une demi-heure, criai-je.

Une demi-heure plus tard nous sommes de nouveau réunis, Claire était en retard comme d’habitude.

– Alice est innocente, annonça Arnaud, elle un alibi de cheval, ça fait deux jour qu’elle est à l’infirmerie avec une fièvre en béton.
– Ok, bon et toi Aurélie, me demanda Sébastien impatient ?
– Estelle m’a montré le cadeau que Noé lui a offert : c’était le livre d’histoire qu’il lui avait emprunté pour réviser l’interro… Rassuré Sébastien ?

– C’était maintenant au tour de Sébastien de rougir : ils étaient quand même dans les toilettes des filles.
– Tiens voilà Claire, annonçai-je pour changer de sujet !
– Alors, cette enquête, se moqua Claire ?
– Noé n’est pas amoureux d’Estelle, il lui avait juste emprunté son livre d’histoire !
– Et le bracelet, il ne vous intéresse plus, demanda Claire ?
– Si, si, bien sûr, dit Sébastien, toujours pour changer de sujet !
– Eh bien, au cas où vous seriez encore sur le coup, sachez que je viens de le retrouver, annonça Claire en brandissant l’objet !
– Comment as-tu fait, m‘exclamai-je, raconte !
– Je flânais dans le jardin. Il fait vraiment très doux aujourd’hui, vous ne trouvez pas ? Je cueillais les fleurs que Madame la Directrice nous jetterait au visage.
– Oui, bon, abrège, coupa Arnaud !
– Soudain j’entends un bébé pleurer ! C’est le bébé de la directrice, avec sa nounou. Je m’approche du berceau : oh qu’il est beau le bébé, mais il est tout mouillé le bébé, il faut le changer le bébé… Et qu’est-ce que je découvre sous le cul de bébé ?
– Le bracelet !!!
– C’est la nounou qui a fait le coup, pensai-je tout haut.
– Rapportons le bracelet à la directrice, elle tirera ses conclusions elle-même, proposa prudemment Arnaud. L’accusation qu’il avait portée à tort contre Noé, tout à l’heure, lui avait laissé un goût bizarre sur la langue.

La directrice fût très heureuse de retrouver son bracelet.

– Ce n’est pas la nounou qui est coupable, dit-elle en voyant nos regards gênés. C’est mon bébé ! Je me souviens l’avoir pris dans mes bras et être restée un moment le dos à la cheminé. Il en aura profité pour prendre le bracelet : ça faisait longtemps qu’il en avait envie, plaisanta-t-elle.

Pour vous récompenser, Jean-Paul vous a préparé une surprise : vous animerez la prochaine veillée en mettant en scène vos aventures dans une pièce de théâtre. On ne change pas une équipe qui gagne. Encore bravo !

– Je crois que je commence à avoir de la fièvre, murmura Sébastien…

Comment alloins-nous faire pour ne pas avouer publiquement à nos camarades, que nous avions soupçonné certains d’entre eux ?

– Sébastien n’était pas du tout à l’aise. Non, franchement, Claire, tu aurais dû le laissé où il était ce bracelet. La nounou aurait bien fini par le retrouver.
– Ça va encore être de ma faute. De toutes façons, on n’est pas obligé de dire la vérité. On aura qu’à inventer.
– Oui, proposa Arnaud, on pourra dire que c’est Claire qui l’avait volé et qui a fait semblant de le trouver dans le berceau du bébé de la directrice.
– Ça va pas la tête, non ?



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